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Union bancaire francophone : « Privilégier les actions concrètes »

Créé le

09.12.2013

-

Mis à jour le

06.05.2014

L’Union bancaire francophone, qui comprend 20 associations bancaires, a réuni fin septembre 2013 son comité de pilotage à Paris. Ce fut l’occasion de faire le point sur les travaux et objectifs de cette Union créée il y a un peu plus d’un an, tant en matière bancaire et financière que sur le plan de la Francophonie.

L’Union bancaire francophone (UBF) a pour objectif de fédérer, du Nord au Sud, les associations bancaires des pays de langue française. El Hadi Chaibainou, directeur général du Groupement professionnel des banques du Maroc et membre du Comité de pilotage de cette Union, en rappelle la genèse : « Les discussions à l’origine de l’Union bancaire francophone ont commencé lors d’un forum de dialogue arabo-francophone en 2011 à Paris, auquel Mme Christine Lagarde, alors ministre des Finances, de même que le secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), M. Abdou Diouf, plusieurs présidents de banques du monde arabe, maghrébin et européen y ont pris part.

Depuis lors, nous avons tenu plusieurs réunions au niveau de la Fédération Bancaire Française pour mettre en forme ce projet ambitieux à travers des actions concrètes.

Dans ce cadre, fut organisé le 20 septembre 2012 à Marrakech une première rencontre sur un thème fédérateur et d’actualité qu’est l’accompagnement des petites et moyennes entreprises qui a connu un grand succès avec plus de 350 participants et des recommandations réalistes ainsi que des échanges intéressants d’expériences.

En cette occasion, fut annoncé le 21 septembre 2012 la création de l’Union Bancaire Francophone qui a tenu sur place une réunion de son comité de pilotage, lequel a fait le point sur notre plan d’action et sur l’autre projet aussi concret qu’est le réseau en cours de montage entre les membres.

Actuellement, notre démarche concrète et relativement discrète donne des résultats probants puisque nous nous rencontrons très régulièrement à Paris en vue d’évaluer nos échanges et de tracer les perspectives d’avenir.

Ainsi, notre réseau est aujourd’hui sur pied et nous sommes déjà entrain de préparer notre deuxième rencontre à Bruxelles au printemps 2014 sur un thème également porteur que celui de notre première conférence, à savoir l’inclusion et l’éducation financières.

Vous voyez bien que la dynamique est bien enclenchée et les banques francophones bien engagées dans cette œuvre fédératrice autour de la francophonie économique et financière. »

Jean François Pons, directeur des affaires européennes et internationales de la FBF, confirme les options prises : « Après la réunion de mars 2011, où la Fédération des banques françaises a été représentée par sa directrice générale, Ariane Obolensky, nous avons effectivement travaillé à la constitution de l’UBF en bonne intelligence avec l’ensemble de ses membres. Il faut souligner que nous avons fait le choix d’une structure légère, basée sur les contacts et le volontariat. Nous avons rejeté l’hypothèse d’avoir des statuts, une association formellement constituée, un président : nous travaillons sur la base du réseau et de la coopération de tous. Ainsi le mouvement professionnel des banques marocaines a été à l’initiative de la conférence de Marrakech ; le site internet de l’UBF est développé avec l’aide de l’ ABBL [1] . La prochaine conférence est organisée sous l’égide de Febelfin [2] . Et la FBF a été d’un commun accord désignée pour assurer un rôle de secrétariat de l’UBF. »

La francophonie pour voir le monde différemment

L’adhésion des membres de l’UBF s’explique par des motivations multiples qui portent sur leur volonté de développer le secteur bancaire et financier, de soutenir la croissance, ou encore de s’ouvrir vers l’international.

Pour la Belgique, Michel Vermaerke, administrateur délégué de Febelfin explique : « Suite à la crise de 2008, nous nous sommes interrogés sur les leçons à en tirer, et sur notre rôle et mission envers la société civile. Nous avons constaté que l’idée d’une confiance absolue dans le fonctionnement efficient des marchés avait ses limites, mais beaucoup d’avancées avaient déjà été enregistrées dans l’intervalle afin de développer un secteur bancaire stable au service de l’économie. L’UBF avec le soutien et l’appui de la francophonie permet d’avoir une autre vision des défis qui nous attendent. »

Une vision également défendue par Makram Sader, secrétaire général de l’Association des banques du Liban : « Étant un pays francophone, il est logique d’être là. La francophonie, depuis 15 à 20 années, a été élargie à beaucoup de domaines d’activité, professionnels, culturels… Il n’y a pas de raison que cela ne touche pas ce domaine important qui est celui de la banque et de la finance. » (voir Encadré 1)

Échanges d’expériences et de bonnes pratiques

La Fédération des associations bancaires de l’ UEMOA [3] avance deux raisons principales de son adhésion à l’UFB. « Premièrement, pour bénéficier de transferts de compétences, de bonnes pratiques, qui peuvent nous aider, car nos pays ont d’autres problèmes que les pays du Nord, explique Pierre Zerbo, son président, et deuxièmement, pour nous mettre un peu à l’abri ou nous préparer à certaines situations que connaissent ou ont connues les pays européens ».

Éric Prud’homme, directeur général à la Direction du Québec de l’Association des banquiers canadiens, renchérit : « Il est intéressant de constater grâce à ce réseau d’échanges et de discussions, que tous les membres de l’Union bancaire francophone, qu’ils évoluent en Afrique, en Europe ou comme nous en Amérique, font face à des réalités communes et ont des enjeux identiques par exemple en termes d’éducation financière, thème de la prochaine conférence de l’UBF, même si chacun a ses propres expériences et outils. »

La Commission de l’UEMOA elle-même, qui a pour mandat d’impulser et de coordonner l’intégration économique en Afrique de l’Ouest, « a accepté d’accompagner la création de l’UBF d’abord parce que l’ensemble de nos États membres sont francophones à part la Guinée Bissau, souligne Hamza Ahmadou Cissé, ambassadeur représentant résident de la Commission de l’UEMOA à Bruxelles ; deuxièmement nous opérons dans le domaine économique et financier ; troisièmement nos membres sont fortement intéressés par les objectifs poursuivis par l’UBF, centrés sur les échanges d’information, d’expérience et le réseautage. Nous fonctionnons sur les mêmes principes avec nos pays membres, mais aussi avec les autres organisations d’intégration régionales comme la CEDAO [4] et la CEMAC [5] ».

Ouverture du système bancaire et bancarisation

Les enjeux sont parfois plus explicites encore : pour l’Association professionnelle des banques et établissements financiers de Côte d’Ivoire, par la voix de son vice-président, Guy Koizan, « au lendemain de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire , il est important pour nous d’avoir une ouverture plus large à l’international. Car nous avons toujours été un pays très tourné vers l’extérieur. Aujourd’hui, le marché bancaire ivoirien comprend de nouveaux acteurs relativement importants, notamment des banques marocaines. Nous ne voulons pas manquer d’offrir cette opportunité aux autres partenaires de la francophonie. »

Michel Losembe, président de l’Association congolaise des banques [6] précise que « le déclic pour nous a été le sommet de la Francophonie à Kinshasa en octobre 2012, qui nous a conduits à accepter immédiatement la proposition de l’UBF à la RDC deuxième pays francophone dans le monde. Nos objectifs sont bien entendus le transfert de compétences, mais notre combat porte sur la construction d’un système bancaire solide, l’inclusion financière, la lutte quotidienne pour ramener l’économie informelle dans l’économie formelle. »

Cosme Ahouansou, directeur exécutif de l’Association professionnelle des banques du Bénin, expose sans détour la situation : « Le Bénin s’étend sur 112 600 km2 avec 9 millions d’habitants ; son système bancaire comprend 12 banques avec une Bourse régionale commune aux huit pays de l’UEMOA, donc ses activités sont sommaires et le marché est peu profond. En participant à l’UBF, le Bénin souhaite nouer des partenariats parce que les besoins sont énormes avec un taux de bancarisation qui ne dépasse pas encore 6 %. Nous avons besoin de formation, de compétences et d’innovations. »

Des avancées depuis la création de l’UBF

Depuis sa création officiellement annoncée lors de la conférence de 2012, l’UBF est allée de l’avant : « nous avons élargi le cercle de nos membres, avec l’arrivée de la République démocratique du Congo et de l’île Maurice. Notre réseau s’est étendu » souligne Jean-François Pons. « Notre site Internet devrait être finalisé dans les prochains jours et nous échangeons régulièrement sur les sujets d’intérêt pour les uns et les autres. » Ainsi, lors de la réunion du comité de pilotage de l’UBF en octobre 2013 à Paris, Éric Prud’homme a délivré une communication sur les bureaux de crédit et autres fichiers positifs. La FBF, de son côté, a fait un exposé sur les dernières avancées concernant la création d’un superviseur unique européen.

Enfin, une charte a été rédigée et signée par l’ensemble des pays membres de l’UBF. En outre, « depuis la conférence sur le thème de l’accompagnement des TPE/PME de 2012, plusieurs mécanismes ont pu être transposés en les adaptant chez les uns et les autres. Ce sera probablement la même chose avec l’éducation financière » confirme El Hadi Chaibainou.

Les perspectives

La prochaine étape déjà programmée est donc l’organisation au printemps 2014 à Bruxelles, de la 2e conférence de l’UBF.

Hervé Cronel, conseiller spécial chargé de l’économie et du développement au Cabinet du secrétaire général de l’OIF affiche la même détermination en matière de francophonie : « En même temps que naissait l’UBF, est apparu un réseau des associations professionnelles francophones qui regroupent des professions telles que les notaires et les géomètres, les experts en matière de comptabilité et finance. Ces réseaux doivent s’interconnecter pour former en quelque sorte, un réseau normalisé pour un partage du français dans le travail, dans la création de savoirs nouveaux, et l’évaluation de savoirs disponibles, afin de prendre position dans un monde dont on voit qu’il devient multipolaire. »



1 Association des banques et banquiers, Luxembourg. 2 Fédération belge du secteur financier. 3 Union économique et monétaire ouest africaine. 4 Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. 5 Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale. 6 République démocratique du Congo.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº767
Notes :
1 Association des banques et banquiers, Luxembourg.
2 Fédération belge du secteur financier.
3 Union économique et monétaire ouest africaine.
4 Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest.
5 Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale.
6 République démocratique du Congo.