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Économie

Les règles prudentielles menacent l’équilibre financier de la zone euro

Créé le

10.05.2012

-

Mis à jour le

30.05.2012

Si, aux États-Unis, entreprises et collectivités locales sont essentiellement financées par des obligations, en zone euro, elles le sont surtout par du crédit bancaire. Nous nous demandons ici comment les nouvelles règles prudentielles des intermédiaires financiers vont modifier le modèle de financement de la zone euro, et plus généralement son équilibre financier. Bâle III, en effet, va conduire les banques européennes à devoir poursuivre la réduction de leur ratio crédits/dépôts (1,14 en 2007, pour 1,07 aujourd'hui) et à accroître leurs réserves de liquidité. Celles-ci peuvent être investies en cash, en obligations d’État et des agences, en covered bonds.

On s’attend à observer dans la zone euro une réduction de la distribution de crédit bancaire aux entreprises et aux collectivités locales au profit du marché obligataire, sur le modèle américain. La marge de manœuvre se situe essentiellement sur les PME, les grandes entreprises se finançant sur les marchés obligataires. Réduire le crédit aux ménages est plus difficile, puisqu’ils n’ont pas de financement de substitution. Mais les règles prudentielles des assureurs européens (Solvabilité 2), ainsi que les règles internes des investisseurs institutionnels (rating minimum, liquidité minimale) rendent très difficile la détention d’obligations émises par des entreprises ou de petites collectivités locales.

Il y a donc en réalité une grande difficulté, pour la zone euro, à passer au modèle américain de financement obligataire : les investisseurs institutionnels de la zone euro investissent essentiellement en obligations publiques (États, agences) ou de grandes entreprises, et en covered bonds, c'est-à-dire assez largement les titres que les banques vont devoir acheter pour constituer leurs réserves de liquidité. La forte demande pour ces titres devrait tirer vers le bas les taux d’intérêt sur les dettes « sûres ». Les petites collectivités locales et les PME vont, quant à elles, éprouver des difficultés de financement. On peut donc craindre un fort recul de l’investissement public, essentiellement réalisé par les premières, et de l’investissement des entreprises de la zone euro. Pourtant, en 2012, l'investissement public est déjà 20 % plus bas qu'en 2009, et l'investissement des entreprises 17 % plus bas qu'en 2008.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº749