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Politique monétaire

Fed et BCE : pas d’inflexion… pour le moment

Créé le

23.03.2021

Longtemps jugée insuffisante, l’inflation pourrait faire son retour. Les taux long obligataires augmentent sensiblement aux États-Unis. Fed et BCE maintiennent leurs politiques accommodantes mais la question se pose d’une diminution de la stimulation monétaire.

En quelques semaines, entre la mi-février 2021 et le début du mois de mars, la peur a changé de cause. Tout début février, il était encore possible de se lamenter face à un taux d’inflation sensiblement plus bas que l’objectif que se sont fixé la Réserve fédérale américaine (Fed) et la BCE (2 % ou légèrement en deçà). Quand l’inflation allait-elle enfin atteindre ce niveau ? La peur de la déflation rôdait encore.

Longtemps jugée insuffisante, l’inflation a soudain été davantage perçue comme une menace, notamment en raison des soupçons qui pèsent sur le plan de relance américain (voir ci-contre) qui pourrait être surdimensionné. Quelle allait être la réaction des banques centrales ?

La Fed avait prévenu dès le 27 août 2020 : elle calcule désormais son objectif d’inflation en réalisant une moyenne sur une période relativement longue. L’inflation ayant été trop basse pendant une longue période, elle peut dépasser les 2 % pendant un certain temps. Si Jerome Powell était resté flou quant à la temporalité, son message signifiait clairement qu’une remontée de l’inflation n’entraînerait pas automatiquement un resserrement de sa politique monétaire.

À l’issue de la réunion du FOMC du 17 mars 2021, Jerome Powell n’a annoncé aucun changement notable. Dans les prévisions de la Fed, Christian Scherrmann, économiste US chez DWS souligne que « l'inflation devrait dépasser légèrement les 2 % cette année, avant de redescendre à 2 % en 2022 et de remonter légèrement à 2,1 % en 2023 ».

Quant à la BCE, certains observateurs lui prêtent l’intention d’emprunter la même stratégie que la Fed : Patrick Artus, chef économiste de Natixis, écrivait le 8 février dans les colonnes de Banque & Stratégie (Groupe Revue Banque) : « la BCE pourrait, dans la revue stratégique de sa politique, passer à un objectif d’inflation symétrique autour de 2 %, ce qui ressemble furieusement à un objectif d’inflation moyenne. » Ainsi, la BCE pourrait, elle aussi, laisser quelque peu filer l’inflation si inflation il devait y avoir.

Remontée des taux obligataires

Mais l’inflation ne vient pas seule. Elle est précédée par une remontée des taux obligataires dans le marché qui anticipe le fait que l’inflation va grignoter les rendements. Cette remontée était nettement observable au travers de la progression des taux à 10 ans américains la semaine du 15 mars 2021. Or, si les taux obligataires remontent dans le marché, les États risquent de ne plus être en mesure de continuer à emprunter massivement pour soutenir les économies éprouvées par la pandémie. Les annonces du 11 mars 2021 de la BCE devraient aider au maintien de conditions de financement très favorables puisqu’une accélération des achats d’actifs est programmée pour le second trimestre 2021.

La fin d’un consensus

Toutefois, Axel Botte, stratégiste international chez Ostrum Asset management, souligne que « les Banques centrales dans le monde ne sont plus unanimes quant à la nécessité de maintenir une politique accommodante. Le pic de la stimulation monétaire est probablement derrière nous ». Le statu quo défendu le 17 mars par Jerome Powell pourrait ne pas tenir très longtemps. Le stratégiste estime que « le Président de la Fed peine à justifier le statu quo monétaire, alors que la croissance a été revue à la hausse en 2021, que l’inflation accélère et que le chômage tombera à 4,5 % en fin d’année, selon les projections communiquées par le FOMC ».

S. G. Achevé de rédiger le 22 mars 2021.

 

 

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº855