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Panique bancaire

La BCE teste la durée de survie des banques face aux chocs de liquidité

Créé le

21.02.2019

-

Mis à jour le

27.02.2019

Le superviseur observe les flux de trésorerie à court terme des banques, en simulant des chocs liés à des retraits bancaires massifs.

L’édition 2019 du test de résistance prudentiel de la Banque Centrale Européenne (BCE) aura pour objet la sensibilité des banques au risque de liquidité. De février à juin, une centaine de grandes institutions bancaires seront confrontées à des simulations de chocs « hypothétiques, adverses et extrêmes », liées à d’importantes sorties de liquidité. Les flux de trésorerie à court terme des banques seront analysés pour calculer leur durée de survie, c’est-à-dire le nombre de jours pendant lesquels elles seront en mesure de poursuivre leurs activités sur la base de leur trésorerie et des garanties disponibles, sans aucun accès aux marchés de financement.

Un risque aussi politique

Le test 2019 diffère des tests habituels imposés aux banques soumises à la surveillance de la BCE : il ne s’agit pas d’un simple suivi du ratio de liquidité, ni d’un stress-test classique. L’exercice s’annonce assez théorique, note Mathieu Plane, directeur adjoint, économiste au département analyse et prévision à l’OFCE. « Face à une crise de ce type, la BCE accorderait normalement aux banques un accès privilégié à des montants illimités de liquidité, que ce soit par la mise en place de facilités de refinancement ou de politiques non conventionnelles telles que les LTRO (Long term refinancing operations) ou TLTRO (targeted long-term refinancing operation). Dans le cadre de ce test, on suppose qu’elle ne remplit pas ce rôle essentiel. » Le risque étudié est n’en est pas moins réel. « Les crises bancaires récentes ont toutes démarré par des crises de liquidité, rappelle Mathieu Plane. La faillite de Lehman Brothers a commencé ainsi : une crise financière, qui a été fortement amplifiée par une crise de la confiance et un blocage du marché interbancaire de prêts à très court terme. On n’est jamais à l’abri d’un fort retournement financier, qui pourrait se traduire d’abord par une crise de liquidités si une grosse banque fait défaut. Mais il existe aussi en Europe un risque politique certain, avec des tentations de repli dans plusieurs pays, ou d’élections à l’issue incertaine. Dès que l’adhésion d’un pays au projet européen ou à la monnaie commune n’est plus garantie, il existe potentiellement un risque de retraits bancaires massifs. »

Des résultats confidentiels

Les résultats de ce test de résistance seront pris en compte dans les évaluations prudentielles menées en continu par la BCE. Mais ils n’affecteront les exigences prudentielles en matière de fonds propres et de liquidité, précise le superviseur. L’analyse de sensibilité « n’évaluera pas les causes possibles de ces chocs ni l’impact de perturbations plus vastes des marchés. L’exercice sera réalisé sans faire référence à aucune décision de politique monétaire ». Si la finalité annoncée du test est de fournir à la supervision bancaire des informations sur la vulnérabilité relative des banques confrontées à un éventuel choc de liquidité, les résultats obtenus par chacune resteront confidentiels. « La Banque Centrale souhaite exercer son rôle de superviseur sans prendre le risque d’envoyer des signaux dangereux aux déposants, explique Mathieu Plane. Les résultats collectifs seront peut-être publiés agrégés, car les risques d’identification sont moindres. Cette façon de procéder protège d'une fuite des dépôts d’une banque vers une autre, ou hors d’Europe. Cela n’empêchera pas la Banque Centrale de communiquer directement avec ces banques. »

Géraldine Dauvergne

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº830