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Les marchés dans tous leurs états

Créé le

16.11.2011

-

Mis à jour le

30.11.2011

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La crise de la zone euro, dont les répliques continuent d’agiter les sphères de la politique et de l’économie, a largement participé aux mouvements de panique des marchés des derniers mois. À l’issue du sommet du G20 de Cannes, alors que d’aucuns ont prédit la « fin du monde », il semble que celui-ci se relève, un peu groggy certes, mais pétri de deux certitudes : pour renouer avec la confiance des marchés et des peuples, il faut réformer le système financier et instaurer une vertu budgétaire depuis longtemps oubliée. A. M.

Ils ont dit

Sagesse de l'ancien banquier

« Une sphère financière autonome a enflé, atteignant des volumes sans commune mesure avec les besoins de l’économie réelle, notamment pour les produits dérivés. Cela a conduit à des niveaux de profits et de rémunération des spécialistes que l’opinion n’accepte plus, et aussi à des excès, voire des abus, qui n’ont pas été assez condamnés. De plus en plus sophistiquée, la finance de marché s’est en outre appuyée sur des modèles mathématiques pour valoriser ses actifs et analyser ses risques. Mais ces modèles ne sont qu’une représentation de la réalité, une maquette simplifiée qui est utile en règle générale, mais qui peut être déconnectée de la réalité lorsqu’un s’éloigne des conditions normales. »

Michel Pébereau, ancien président de BNP Paribas, extrait d’un discours publié dans Les Échos, 16 novembre 2011.

Crédit, parole et crise

« C'est cette inclination à préférer le bien public aux intérêts individuels que Montesquieu appelle la vertu, et qui est le principe de la République. Lorsque la vertu se corrompt, la République périt : “Lorsque les principes du gouvernement sont une fois corrompus, les meilleures lois deviennent mauvaises et se tournent contre l'État” peut-on lire dans L'Esprit des lois. De même, si la vertu disparaît, le marché, qui est à l'économie ce que la démocratie est à la politique, ne peut lui non plus subsister. On pourrait, en paraphrasant Montesquieu, formuler cette maxime : quand la vertu se corrompt, le marché devient mauvais et se tourne contre l'économie. Ainsi la main invisible ne peut apporter la prospérité si les sentiments moraux des agents sont corrompus. C'est ce que la crise financière a mis en évidence. »

Bruno Biais, directeur de recherche (CNRS) GREMAQ, Toulouse School of Economics, hors-série Revue Banque, daté de mai 2011, pp. 64-67.

Vers la création indispensable d'un Trésor européen

« L’incomplétude de la zone euro n’est pas le fait des marchés : elle est celui des gouvernements européens qui se sont contentés de faire l’union monétaire et qui n’ont rien fait pour réaliser l’union politique avant la réaction des marchés à cette incohérence.

Or, c’est seulement sous la pression des marchés financiers que la gouvernance européenne a progressé : la mise en place des plans d’aide qui n’existaient pas, avec les garanties apportées par les États membres en faveur de chacun, le rapport Von Rompuy qui insiste sur les grandeurs à observer pour juger des déséquilibres d’un pays, comme la balance courante et les agrégats de dette du secteur privé alors que tous ces agrégats étaient purement et simplement ignorés auparavant, et l’objectif d’améliorer la compétitivité et la croissance de long terme. Tout ceci ne se serait jamais fait sans la crise de la dette souveraine et donc sans la sanction de l’échec européen par les marchés financiers.

De la même façon, c’est seulement sous la pression des marchés que la création d’un Trésor européen finira très probablement par se faire. »

Laurent Berrebi, directeur des études économiques, Groupama AM, hors-série Revue Banque, daté de mai 2011, pp. 18-20.

Les profits des traders haute fréquence montrés du doigt

« Selon les estimations du Tabb Group, les traders haute fréquence ont augmenté leur activité dans des proportions notables dans les premiers jours du mois d’août 2011, en pleine tourmente boursière.

Aux États-Unis, ils ont représenté 65 % des volumes d’actions échangés, contre une moyenne de 53 % au cours des mois précédents. Le 8 août, qui a vu le Dow Jones Industrial Average plonger de 635 points, les traders haute fréquence ont fait des profits estimés à 60 millions de dollars, ce qui porterait leur gain annuel à environ 15 milliards de dollars, même si la reproduction du phénomène sur une année complète semble peu probable.

À titre de comparaison, les traders haute fréquence auraient engrangé 7,2 milliards de profits sur les marchés actions américains en 2009. »

Annick Masounave, Journaliste, Revue Banque n° 739, daté de septembre 2011.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº742