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Finance décalée 2012

Créé le

20.12.2012

-

Mis à jour le

21.12.2012

Rétrospective 2012 > Sommaire

 

Commedia dell'arte

Silvio Berlusconi est-il encore un homme politique ? Un homme d'affaires ?  Une publicité pour (ou contre ?) la chirurgie plastique ? Ou s'est-il mué en clown ?

Les marchés financiers ont d'abord tremblé lorsqu'ils ont appris, début décembre, l'intention du « cavaliere » de revenir devant les électeurs. Le taux auquel l'Italie emprunte a augmenté, laissant craindre un retour vers l'époque où les marchés exigeaient environ 7 %, ce qui était difficilement soutenable pour le pays. Depuis son arrivée au pouvoir fin 2011, Mario Monti est peu à peu parvenu à ramener ces taux à des niveaux raisonnables, se rapprochant des 4 %.

Quelques jours après son annonce grotesque, Berlusconi faisait déjà un pas en arrière. Le danger semble aujourd'hui écarté, ce qui permet de rire de cette bouffonnerie.

Séparation des activités bancaires : que dit Dieu ?

« Des banques trop grosses pour faire faillite, tu ne constitueras pas. » Ainsi pourrait-on résumer la démarche des Sœurs bénédictines du Mont St. Scholastica, congrégation religieuse de l’État américain du Kansas et par ailleurs actionnaires de Citigroup. Aux côtés du fonds de pension des fonctionnaires américains, les religieuses réclament la constitution d’un Comité d’experts indépendants qui étudierait la question de la séparation d’une ou plusieurs activités du groupe bancaire. Elles font entendre leur voix au travers de leur gestionnaire d’actifs, Trillium AM, connu pour son engagement en faveur de l’ISR. Paradoxalement, ce n’est pas l’argument de la stabilité financière qui est mis en avant par ces défenseurs d’une réforme des structures bancaires, mais plutôt leur intérêt d’actionnaires. « Citigroup se vante d’être très attractif, mais reste plombé par l’excessive complexité de son organisation, ainsi que par le stigmate d’être identifié comme “too big to fail”, avec les risques que cela implique. Ces facteurs peuvent menacer le rendement des actionnaires du fait de défaillances dans le management des risques, d’une intervention accrue du régulateur, de frais de litiges plus élevés, d’exigences en capital supérieures et d’une piètre image auprès du public, entre autres », note Matthew Patsky, CEO de Trillium. L’histoire ne dit pas si Citigroup a écouté « la voix de Dieu ».

KissKissBankBank promeut le don contre don

Un banquier qui se rémunère sous forme de places pour des avant-premières, de noms cités au générique d’un film, de prototypes à exposer dans son bureau ? Et de surcroît, un banquier qui peut être comme tout un chacun derrière son ordinateur ? C’est ce que propose KissKissBankBank qui, en dépit de la double occurrence dans son nom, n’est pas une banque mais une plate-forme de « crowdfunding ». Le concept est apparu aux États-Unis – une loi pour soutenir son développement vient même d’y être votée – et consiste dans le financement de projets de particuliers par des particuliers. Dans le cas de KissKissBankBank comme de son concurrent américain Kickstarter, il ne s’agit pas de « prêts » au sens classique du terme puisque le créancier se voit remboursé par un « don » : des tirages photographiques dans le cadre de l’organisation d’un festival consacré à cet art, un exemplaire du produit dont la création a été financée… Soutenue par la Banque Postale, la plate-forme a permis de lever 2,4 millions d’euros en 2012. D’autres plates-formes de crowdfunding plus classiques, c’est-à-dire basées sur le remboursement du prêt et des intérêts, se développent également en France, comme SPEAR, Babyloan ou Prêt d’Union. Derrière tous ces projets, une même idée : rendre transparente l’utilisation faite de l’épargne des ménages.

Insolite : en 2014, le premier trader dans l'espace

Dans un futur proche, les missions dans l’espace ne seront plus l’apanage de quelques scientifiques chevronnés ou de touristes en mal de sensations nouvelles. Anton Kreil, un ancien trader de Goldman Sachs, a annoncé vouloir inaugurer un record du monde, celui de la première transaction sur les marchés financiers réalisée… dans l’espace, à 100 km au-dessus du sol.

Malgré le prix du ticket – 95 000 euros tout de même, acquittés auprès de Space Expedition Corporation, une société néerlandaise spécialisée dans les vols spatiaux –, l’opération est déjà un joli coup de communication pour cette ex-star de la finance, aujourd’hui reconvertie dans le conseil. Anton Kreil a en effet révélé la tenue de négociations avec des banques d’investissement et des brokers, sponsors potentiels intéressés par la publicité que cette performance pourrait faire à leurs produits.

Fidor ou la banque entre amis

Rendre la banque accessible, collaborative et accessoirement drôle : c’est le pari de l’Allemand Fidor Bank, pure émanation du Web 2.0. Premièrement, c’est par l’intermédiaire de son compte Facebook que l’on devient client – mais après tout, BNP Paribas permet bien de le faire via Twitter ! Ensuite, Fidor se veut avant tout une communauté d’utilisateurs des services bancaires qui partagent leurs connaissances et leurs bons plans en matière de finances personnelles. Surtout, les clients voient leur compte courant rémunéré… en fonction du nombre de « J’aime » sur la page Facebook de la banque ! En cette fin d’année, le compteur est ainsi à 14 119 « likes », soit un taux d’intérêt de 1,1 %. 1 881 de plus et le taux grimpera de 0,1 %. Outre le compte-courant, Fidor propose un certain nombre de services bancaires 2.0, allant de la carte prépayée pour les achats sur Internet au prêt en peer-to-peer, en passant par le transfert d’argent via Twitter. On peut même y gérer ses monnaies virtuelles issues de son activité sur les jeux en ligne…

Finance bling bling sur grand écran

La finance est désormais une source d’inspiration pour les réalisateurs de films, et non des moindres. Ainsi, courant 2012, ont défilé sur les écrans Cosmopolis de David Cronenberg, Le Capital de Costa Gavras, ou encore Arbitrage de Nicholas Jarecki. Tous mettent en scène des antihéros, patrons de la finance cyniques, sans morale, alignant tous les stigmates de richesse : vaste appartement, jet, limos… L’image du secteur financier reste à cette aune très dégradée, voire stéréotypée. À quand une fresque réaliste de Ken Loach sur la solitude du conseiller professionnel ou le quotidien d’une agence bancaire dans la banlieue industrielle de Liège vu par les frères Dardenne ?

 

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À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº755