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Simplifier vraiment

Créé le

20.01.2014

-

Mis à jour le

29.01.2014

Simplifier vraiment

La simplification de la vie des entreprises a été à nouveau mise en avant par le président de la République lors de sa conférence de presse du 14 janvier. Il a rappelé qu’il avait confié une mission à un parlementaire, Thierry Mandon, et à un chef d’entreprise, Guillaume Poitrinal, pour identifier les mesures de simplification à prendre lors des « 10 actes clefs » de la vie d’une entreprise.

Tout le monde s’accorde pour dire qu’il faut simplifier la vie des entreprises. Mais de quoi s’agit-il au juste et dans quel but ? S’il s’agit de donner plus de liberté et de capacité d’entreprendre, la simplification ne peut se limiter – comme c’est parfois le cas –à un « nettoyage » des dispositions législatives et réglementaires pour se débarrasser de dispositions obsolètes et tombées en désuétude. Le Code du travail contient un nombre important de ces dispositions qui ne sont plus appliquées et dont personne ne demande l’application (par exemple, les chambres d’allaitement). Ce genre d’opération « code propre » aurait pour effet d’en diminuer la taille et le poids, mais n’aurait pas d’effet sur la vie concrète des entreprises puisque ces dispositions ne sont plus appliquées. Simplifier ne peut pas non plus se limiter, comme cela a été annoncé par le ministre du Budget, à la suppression de taxes à faible rendement et dont le coût de recouvrement est prohibitif par rapport au produit. Cela simplifie la vie de l’administration, mais a très peu d’effet sur la vie de l’entreprise.

Pour que la simplification se traduise réellement par une meilleure capacité de créer et d’entreprendre, il faut une diminution réelle des contraintes qui pèsent sur les entreprises et une meilleure sécurité juridique. Ces exigences supposent de remettre en cause de nombreuses normes en matière sociale. On peut citer les procédures de rupture du contrat de travail, la multiplication des instances représentatives du personnel au nombre de quatre en France (délégués syndicaux, délégués du personnel, délégués syndicaux et membres des CHSCT), la multiplication des expertises de toutes sortes à la disposition des représentants du personnel, les sanctions démesurées appliquées en cas d’irrégularité de forme qui invalident une décision valable sur le fond. Tout cela « pourrit » la vie quotidienne des entreprises et a un coût qui n’est pas pris en compte dans les comparaisons internationales du coût du travail. Au-delà du coût, cela incite les entreprises à avoir des politiques d’embauche très prudentes, car un salarié de plus peut être la source d’ennuis supplémentaires. Quand employer devient risqué, le niveau d’emploi s’en ressent.

Un souci de cohérence doit aussi guider une telle démarche. Alors que le président de la République met en avant la nécessité de simplifier, des textes récents ou en cours de discussion au Parlement viennent le contredire. Avant de simplifier, il faudrait d’abord arrêter de complexifier. Avant de supprimer des normes, il faudrait d’abord arrêter d’en créer de nouvelles tous les jours. Chaque norme ou règle a sa propre justification, mais leur multiplication a un effet mortifère sur l’activité économique. On peut citer les mesures relatives à la pénibilité dans le cadre de la loi sur les retraites, dont les multiples décrets sont en cours de rédaction, la proposition de loi « visant à reconquérir l’économie réelle », qui va obliger les entreprises à retrouver un repreneur en cas de fermeture de site, ou encore les dispositions qui renforcent les contrôles de l’inspection du travail dans le cadre de la loi sur la formation professionnelle et la démocratie sociale. Au total, la simplification n’est qu’une facette de l’action qui doit plus généralement viser à diminuer les contraintes qui pèsent sur les entreprises et qui brident leur développement et nuisent à l’emploi.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº769