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Visa Inc. rachète Visa Europe : une belle opération financière à court terme

Créé le

26.11.2015

-

Mis à jour le

01.12.2015

Visa Inc. a annoncé début novembre l’acquisition de Visa Europe pour 21,2 milliards d’euros, dont 16,5 milliards versés immédiatement sous forme de 11,5 milliards en cash et 5 milliards en actions Visa, auxquels devraient s’ajouter, dans quatre ans, 4,7 milliards d’euros subordonnés à la réalisation de certains objectifs.

« Les banques actionnaires de Visa Europe réalisent ainsi à court terme une belle opération financière, surtout dans un contexte dans lequel la réduction des commissions d’interchange sur cartes imposées par la réglementation européenne peut conduire à une baisse de la valeur de Visa Europe », souligne Régis Bouyala, Associé gérant de Pémance.

Visa Inc de son côté peut se satisfaire de piloter désormais un groupe mondial, sans craindre des décisions européennes qui pourraient ne pas être totalement alignées avec ses intérêts. En outre la maîtrise de l’ensemble de son réseau peut conduire à une hausse de la valorisation boursière du groupe.

À moyen ou long terme, cependant, un certain nombre de questions se posent : « Visa, groupe coté, déchargé de son affectio societatis européen, ne pourrait-il pas relever ses tarifs vis-à-vis de ses clients banques » s’interroge Régis Bouyala, surtout dans une situation de duopole entre Visa et Mastercard qui peut faire craindre une réduction des conditions de concurrence ? Visa peut-il être tenté à terme de démarcher en direct les commerçants les plus importants en contournant le passage jusqu’alors obligé par les banquiers acquéreurs ?

Reste enfin un sujet plus épineux autour des données sur les transactions réalisées par Visa, qui seront selon toute vraisemblance désormais logées aux États-Unis : suite à la décision de la CJUE invalidant l’accord Safe Harbor d’échange de données entre l’Europe et les États-Unis, comment y avoir accès ? Pire encore, que se passerait-il si le gouvernement américain demande aux systèmes américains, comme il l’a déjà fait vis-à-vis de la Russie lors de l’embargo envers l’Ukraine ou de certains pays d’Europe de l’Est pour des risques sérieux de fraude, d’arrêter d’opérer en Europe ? Le scénario semble aujourd’hui très hypothétique mais les équilibres géopolitiques sont parfois instables et le droit américain peut être très brutal lorsque la défense des intérêts du pays est en jeu…

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº790