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Gestion

Management visuel : retour aux fondamentaux

Créé le

10.02.2015

-

Mis à jour le

09.03.2015

Le management visuel est une démarche de management qui trouve son origine dans l’industrie automobile japonaise. Il privilégie le management de proximité, l’écoute et l’interaction avec les collaborateurs au moyen d’outils simples, essentiellement un tableau ! À l’heure de la digitalisation, les rapports directs ont parfois du bon…

Donner du sens, écouter, manager les compétences, respecter les exigences administratives et réglementaires, intégrer la satisfaction clients, ouvrir l’équipe sur l’extérieur, et surtout accompagner individuellement et collectivement les collaborateurs sur un cœur de métier qui bouge… Qu’il soit en agence ou en back-office, telle est la liste non exhaustive des responsabilités que l’on fait porter au manager de proximité…

Côté collaborateurs, l’évolution n’est pas moins significative : poids croissant de l’administratif, multicanal, nouveaux outils, exigence de performance et de qualité, exigences clients… les fameux risques psycho-sociaux ont fait leur apparition, ne faisant que renforcer l’enjeu critique d’un management performant.

L’agence et les services de siège sont devenus des centres de performance qui se doivent une réactivité autonome pour s’adapter, et donc un management de terrain capable à son niveau de traiter ses problèmes techniques et managériaux, en s’appuyant au maximum sur les forces en présence, en l'occurrence les collaborateurs. Les programmes de formation contribuent à repositionner le manager dans son rôle et dans ses actes fondamentaux de management, mais les rituels d’animation individuels et collectifs peinent souvent à s’ancrer, ils restent très centrés sur l’activité opérationnelle plus que sur la recherche d’améliorations, dans une dynamique assez descendante…

Le management visuel fait partie des outils capables d’épauler le manager pour rythmer ses rituels, cadrer leur contenu, et surtout lancer une dynamique participative de manière incontournable.

Les dirigeants qui ont décidé de l’implanter recherchent en priorité

  • la performance : dynamique et efficacité commerciale, productivité, satisfaction clients, diffusion des bonnes pratique ;
  • l’amélioration du bien-être des collaborateurs : renforcement du participatif, écoute, traitement au fil de l’eau des problèmes quotidiens, responsabilisation et délégation…

Une approche participative

Le management visuel trouve son origine dans l’industrie, chez Toyota, comme pilier du Toyota Production System (TPS). Dans son acception initiale, le TPS place l’homme et sa satisfaction au cœur de la performance, l’écoute et la résolution participative des problèmes au centre du management de proximité, une définition du lean trop souvent oubliée… Il met à disposition des managers de proximité des outils de résolution participative des problèmes et difficultés. Au centre, le management visuel est le point de rencontre entre le manager et son équipe. Le concept se fonde sur une réflexion basée sur les sens : on intègre beaucoup mieux ce qu’on voit que ce qu’on entend, et beaucoup mieux ce qu’on écrit que ce qu’on lit… (voir Figure 1). Il s’appuie sur la notion d’équipe de base dans laquelle le collaborateur se reconnaît dans un univers à sa taille.

Quelques années plus tard, l’industrie se penche sur le management de ses fonctions supports, à des fins de cohérence managériale, mais aussi d’alignement de la qualité de service sur les exigences de la production ; le management visuel est adapté aux fonctions administratives : comptabilité, paie, administration des ventes, informatique, marketing

Puis, naturellement, les activités de services expérimentent le management visuel. La méthode d’implantation est adaptée pour tenir compte d’une culture différente de la productivité et du management.

Le management visuel fleurit ainsi au sein des agences bancaires, dans les services de back-office (crédit, épargne, moyens de paiement, flux, assurances, informatique…) et dans les fonctions support (RH, contrôle de gestion, logistique, services généraux…).

Des outils simples…

Le principe s’appuie sur quelques outils simples : un panneau, des rituels de rencontre et une posture managériale. Au centre, le panneau est structuré en fonction des missions et responsabilités de l’équipe. Chaque section présente les indicateurs clés de performance, ou les informations clés nécessaires au quotidien à l’équipe pour travailler (dossiers clés, consignes, priorités, ratios d’analyse, urgences…). Une section sera dédiée à la collecte des problèmes et solutions. Les décisions, de même que les responsables de leur mise en œuvre, sont inscrites sur le tableau. Une section peut être consacrée aux informations plus globales qui donnent le sens et la vision.

Deux à trois rituels clés sont installés entre le manager et son équipe, autour du panneau :

  • quotidien : mise en dynamique, consignes court terme, questions opérationnelles, problèmes rencontrés (voir figure 2) ;
  • hebdomadaire : performances réalisées et analyse des causes, bonnes pratiques, difficultés et problèmes rencontrés, vision semaine suivante ;
  • mensuel : analyse de la performance passée, analyse des causes, projection moyen terme, informations entreprise…
La mise à jour des informations sur le tableau est assurée par les collaborateurs autant que le manager, chacun étant responsable ou coresponsable d’une partie. Le panneau s’alimente au fil de l’eau des réactions, questions et suggestions en fonction des événements connus par l’équipe. Une évolution majeure dans un environnement où la donnée existe à profusion, mais reste souvent cantonnée dans les bases…

La réussite repose sur trois ingrédients :

  • une appropriation forte de la structure du panneau par le manager et les collaborateurs. Ce sera leur panneau, qui doit répondre à leurs besoins ;
  • une posture du manager adaptée : prise de parole, écoute, énergie, participatif, droit à l’erreur ;
  • une évolution progressive des collaborateurs capables d’exprimer leurs difficultés, d’annoncer leurs erreurs, de partager leurs pratiques…
La méthodologie d’implantation sécurise ces trois facteurs. Elle demande patience, écoute, et sagesse aux managers de managers, rongés par une tentation courante : faire en quelques minutes le tableau qui leur conviendrait… Les nombreuses tentatives des plus rebelles l’ont démontré  : ça ne marche pas !

…et des résultats

Après la prise en compte des rituels et affichages existants dans le service, la démarche démarre par le partage des missions et responsabilités de l’équipe, opportunité d’un vrai retour au sens de l’action, voire d’un recadrage d’objectifs fondamentaux parfois mal assimilés, dans des contextes qui ont évoluant très rapidement. Opportunité également de doper la fierté de l’équipe qui reprend parfois conscience de l’enjeu de la réussite de sa mission.

L’équipe exprime les besoins d’information nécessaires à l’activité et structure progressivement son panneau, construit ses rituels avec le manager, jusqu’aux premiers essais pour ajustement. L’accompagnement individuel du manager est nécessaire pour faire évoluer sa posture en cohérence avec l’outil.

Par contre, le management visuel ne fonctionne que s’il est alimenté par du carburant viable… issu de la ligne managériale. Inutile de demander à des managers de proximité d’animer des rituels structurés et participatifs si eux-mêmes ne sont pas animés de cette façon par leurs managers… Inutile de demander à l’équipe d’exprimer leurs objectifs si leurs managers ne les expriment pas de façon claire… Inutile également de demander aux managers de proximité de donner du sens et de la vision si eux-mêmes n’en sont pas nourris… Les plus avancés déploient ainsi le management visuel jusqu’au comité de direction.

Les résultats les plus fréquemment constatés :

  • une redynamisation de l’équipe par l’utilisation d’un outil commun fédérateur au quotidien ;
  • l’amélioration rapide des résultats opérationnels, par la simple mécanique de l’affichage, puis par la décision, l’identification et la délégation d’actions d’amélioration, le partage des bonnes pratiques, la correction des erreurs ;
  • une transformation du manager, plus en écoute, en participatif, en décision, et capable de donner du sens à l’action ;
  • le développement du bien-être dans l’équipe  – grâce au sens donné à l’activité quotidienne, à l’écoute rénovée, à la contribution à l’amélioration –, la visibilité des réussites, la prise en compte des problèmes…
Le panneau peut avoir, certes, un petit air un peu démodé, à l’époque du digital et du Big Data. Pourtant le retour à des fondamentaux simples comme le bonjour du matin est souvent la clé la plus accessible de la mobilisation de l’équipe…

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº782