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Laboratoire d’Excellence Louis Bachelier Finance et Croissance Durable : pour une recherche PPP

Créé le

15.01.2015

-

Mis à jour le

18.02.2015

Plus qu’un laboratoire de recherche, le Laboratoire d’Excellence Louis Bachelier Finance et Croissance Durable est une porte d’entrée vers un centre de recherche en réseau, qui regroupe chercheurs et entrepreneurs autour de l’Institut Louis Bachelier (ILB). Avec pour vocation de produire des travaux de référence pour aider les professionnels de l’industrie financière dans leur prise de décision et la conduite des affaires.

Le Labex Louis Bachelier, lancé en 2008 sous l’égide de l’Institut Louis Bachelier (ILB), ne regroupe pas moins de 17 chaires d’excellences hébergées par les deux fondations de l’ILB, la Fondation du risque (FDR) et l’Institut Europlace de finance (EIF), ainsi que par la Fondation Dauphine. Mais au-delà de ce premier cercle, le Labex Louis Bachelier irrigue aussi un écosystème de recherche regroupé autour de l’ILB, qui fédère plus de 400 chercheurs et 45 programmes de recherche, soutenus par une soixantaine d’entreprises issues du secteur de la banque, de la finance ou des assurances. « Cet ensemble est incité à fonctionner comme un véritable réseau », explique Jean-Michel Beacco, directeur général de l’ILB. Les semestres thématiques qu’organise l’Institut sont un bon exemple de cette mobilisation collective, comme celui qui va s’ouvrir début 2015 consacré à « la financiarisation des marchés de matières premières » : les chercheurs du Labex et des autres instances de l’ILB, ainsi que leurs partenaires professionnels, planchent alors ensemble pendant 6 mois au sein de conférences, cours et autres modes d’interactions.

Le lien entre chercheurs et acteurs économiques est une caractéristique forte du Labex Louis Bachelier. Il définit ce que Jean-Michel Beacco, qualifie d’infrastructure unique de recherche partenariale publique/privée : « Nous avons pour objectif de donner les chemins d’une finance au service de la croissance durable, en travaillant à construire une industrie financière prospère, installée à Paris comme l’est notre Labex et notre recherche, au service de l’économie et des emplois. » Concrètement, le Labex Louis Bachelier a pour ambition de fournir aux décideurs ou acteurs économiques, une production académiquement rigoureuse, neutre et indépendante de tout lobby pour leur donner les moyens de construire leur opinion et d’étayer leurs argumentations. La volonté du Labex de s’ancrer dans l’aval de la recherche, c’est-à-dire dans la création d’entreprises et l’emploi, est d’ailleurs allée jusqu’à installer un incubateur pour les chercheurs désireux de créer leur propre société.

Quatre transitions…

C’est donc assez logiquement en résonance avec les évolutions de l’industrie financière que le Labex a défini quatre axes de recherche, symboliquement baptisées transitions.

La première est la transition bancaire et financière. Elle constitue en quelque sorte le « canal historique » de ce Labex né en 2008, et porte une réflexion sur le thème de l’après-crise et de la régulation des marchés financiers. À l’étude : Bâle III et Solvabilité 2, mais aussi la titrisation, la fiscalité avec notamment la TTFE [1] , ou encore le trading haute fréquence. Cinq ans après la crise, « nous commençons d’ores et déjà à être audibles sur ces sujets » relève Jean-Michel Beacco. En outre l’ILB a organisé une première MOOC [2] sur le thème de « la régulation financière au service de l’économie » en 12 sessions de 20 minutes délivrée entre mi-novembre et mi-décembre 2014, qui synthétise les travaux réalisés autour de la définition d’un marché financier, la régulation financière européenne, l’Union bancaire, Solvency II, les fonds propres des banques, la titrisation ou encore les produits dérivés.

La deuxième transition, menée sur le même rythme « allegro », est celle de la transition énergétique et écologique. De nombreux travaux ont déjà été réalisés sur le prix du carbone, puis sur des sujets plus diversifiés autour de l’économie du climat : agriculture, forêt et bas carbone ou encore mobilité, villes, transports et bas carbone. « Nous nous efforçons d’intégrer les modèles de vie de demain, résume Jean-Michel Beacco, et nous réfléchissons aux moyens de créer des incitations pour des modes de vie plus respectueux des enjeux climatiques ». L’objectif de ces recherches est notamment d’apporter des contributions utiles dans le cadre de la prochaine Conférence Climat des Nations unies [3] qui sera présidée par la France fin 2015.

Troisième axe d’étude, la transition numérique est moins avancée. « Mais nous avons l’intention de progresser vite, souligne Jean-Michel Beacco, en partant d’un double constat : d’une part les données deviennent un actif central dans l’industrie bancaire et financière ; d’autre part, les États Unis avec les moteurs de recherche, Google en tête, ont déjà gagné la bataille des contenants, des tuyaux dans lesquels circulent les données. Mais nous pouvons encore gagner celle des contenus, c’est-à-dire des traitements de ces données, car nous pouvons compter sur une filière française d’excellence qui est celle des mathématiques combinée à une autre filière d’excellence qu’est l’informatique ». Et de rappeler que le Labex Louis Bachelier est totalement partie prenante de cette filière, qu’elle soit déclinée en mathématiques financières, économiques ou informatiques ; son responsable scientifique, Pierre-Louis Lions, n’est-il pas le lauréat 1994 de la médaille Fields, entre autres Français distingués par cette récompense… Mais surtout, les chercheurs peuvent aujourd’hui s’appuyer, pour exploiter leurs connaissances scientifiques, sur de nouvelles technologies en mode open source qui leur donnent une puissance de calcul inédite. Ils sontdans ces conditions capables de mener des recherches dites « non orientées », de repérer des signaux faibles, bref, de « chercher une aiguille dans une botte de foin » plaisante Jean-Michel Beacco. Ce croisement entre une science mathématique où les chercheurs français excellent et la mise à disposition d’une puissance technologique décuplée, devrait permettre de faire aboutir les travaux dans des délais relativement courts.

Reste la transition démographique, avec pour objectif de long terme de travailler sur l’économie du vieillissement, sans pour autant négliger des thèmes de recherche à plus court terme comme le viager ou l’économie de la santé et des retraites, ou des sujets majeurs de société tels que l’emploi et la « sécurisation des parcours professionnels » dans une perspective de longévité accrue. Luc Arrondel et André Masson ont par exemple étudié les effets d’une fiscalité incitative de la transmission de patrimoine : dans une société où peuvent cohabiter quatre générations, l’idée est de montrer que celle-ci doit intervenir suffisamment tôt pour être économiquement utile. Ou encore Brigitte Dormont qui s’intéresse à des éléments contre-intuitifs sur la croissance des dépenses de santé liées à l’âge : les seniors ont certes des frais médicaux plus élevés, mais la chercheuse établit aussi que cette population, lorsqu’elle est en bonne santé, fournit de grands consommateurs de services (loisirs, voyages…) et constitue un véritable moteur économique. D’autres travaux montrent que les dépenses de santé sont corrélées à un accroissement considérable de l’équipement technologique (par exemple en radiologie). Cette inflation de moyens et partants, d’actes médicaux, fait-elle pour autant des personnes en meilleure santé ? « Ces mises en évidence éclairent le débat et permettent aux décideurs de réfléchir aux incitations économiquement les plus utiles », souligne Jean-Michel Beacco.

Un nouveau chantier

D’ici à fin 2015, en s’appuyant sur son Labex, l’ILB aura mené à bien sa première étape consistant à créer un réseau partenarial de recherche de dimension européenne. En parallèle, l’ILB poursuit un autre chantier sur les données, corollaires d’une bonne recherche : il pilote deux chantiers baptisés « Équipements d’excellences » dont l’un consiste en la numérisation des données financières historiques depuis le XIXe siècle et l’autre la numérisation de données haute-fréquence. À terme, ces données commercialisées par IODS [4] assureront aux chercheurs (gratuitement) un accès direct aux matières premières nécessaires pour leurs travaux.

 

E.C.

1 Taxe européenne sur les transactions financières.

2 Massive open line course. 3 La 21e Conférence des Parties (COP) de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques aura lieu à Paris, du 30 novembre au 11 décembre 2015. 4 INSEAD OEE Data Services.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº781
Notes :
2 Massive open line course.
3 La 21e Conférence des Parties (COP) de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques aura lieu à Paris, du 30 novembre au 11 décembre 2015.
4 INSEAD OEE Data Services.