Square

Change et Taux

Trump : un programme incohérent

Créé le

17.11.2016

-

Mis à jour le

10.01.2017

Quand la réalité fait mentir les sondages… M. Trump est élu président des États-Unis. Largement commenté, son programme mérite toutefois d’être rappelé – même s’il a beaucoup fluctué, au point de se contredire parfois. Un point saillant est la baisse massive des impôts, sur les entreprises comme sur les ménages, notamment aisés – au total entre 5 000 et 9 500 milliards de dollars, selon les estimations. Pas beaucoup de baisses de dépenses, en revanche, sinon quelques économies – notamment « en licenciant des bureaucrates qui ne savent que détruire des emplois pour embaucher des experts qui savent créer des emplois [sic] ». Au contraire, le programme prévoit des grands travaux (« routes, ponts, tunnels, hôpitaux, écoles, aéroports »), qui ne seront pas inutiles. M. Trump propose aussi une forte déréglementation dans l’énergie, l’eau, la pollution, la finance. Selon les calculs de Moody’s, le déficit budgétaire serait porté de 3,5 % du PIB aujourd’hui à 10 % au bout de quatre ans. Les optimistes estiment que ce plan de relance massif relancera la croissance. M. Trump évoque même, sur son site, 25 millions d’emplois créés en 10 ans ; cela paraît peu crédible, compte tenu de la démographie. Surtout, d’autres mesures peuvent freiner fortement la croissance. En effet, il est sinon prévu du moins évoqué d’expulser (en deux ans !) les 11 millions d’immigrés clandestins, de dénoncer ou renégocier les accords commerciaux multilatéraux et d’imposer des droits de douane allant jusqu’à 45 %, notamment à la Chine. Il s’ensuivrait des représailles des pays touchés et une forte hausse du prix des produits importés : la Réserve fédérale devrait dans ce cas relever ses taux, quitte à provoquer une récession – c’est en tout cas le scénario de Moody’s, qui chiffre à 10 points de PIB au total la perte d’activité par rapport au scénario de base. Bien sûr, tout ne sera pas appliqué tel quel : le principe de réalité comme le rapport de forces avec un Congrès certes républicain mais plus conformiste en matière économique obligeront à des compromis. D’un autre côté, on ne peut exclure que, comme le souhaitent certains Républicains, la banque centrale soit mise aux ordres du gouvernement, ou soumise à une règle systématique (comme la règle de Taylor), ou encore… supprimée. Nous verrons. M. Bush père qualifiait le programme de M. Reagan d'« économie vaudou ». Pourtant, à sa manière, si contestable soit-elle, il a fonctionné. Peut-être en sera-t-il ainsi avec le programme de M. Trump, si peu cohérent soit-il. Mais il est permis d’être circonspect.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº802