Square

Change et taux

Que faire avec mille milliards d'euros ?

Créé le

13.04.2012

-

Mis à jour le

02.05.2012

Avec deux refinancements à 3 ans, la BCE a « injecté » en tout 1 000 milliards d’euros (pour des durées allant d'1 semaine à 3 ​ans), soit 500 milliards de plus qu’avant la crise : c’est sans précédent par la taille et la durée. S’il est trop tôt pour analyser toutes les conséquences, on peut malgré tout faire quelques observations. Avant tout, il faut dissiper un malentendu fréquent : le fait que les banques redéposent quelque 700 milliards d’euros à la BCE serait la preuve que cet argent ne circule pas, et donc que ces « injections » seraient un échec. Or la hausse de l’encours de la facilité de dépôt n’est que le reflet comptable de la hausse du refinancement. L’actif de la BCE a augmenté, le passif doit donc augmenter d’autant, et le seul poste qui peut s’ajuster à court terme est la facilité de dépôt. Si une banque prête à une autre, c’est celle-ci qui redéposera à la BCE ! De fait, l’argent circule : la BCE signale que ce ne sont pas les mêmes banques qui empruntent et redéposent. C’est une bonne nouvelle : le marché interbancaire redémarre un peu, l’assurance de disposer de fonds à trois ans rétablissant partiellement la confiance. Certes, on ne voit pas encore de reprise des crédits à l’économie réelle. Mais il est trop tôt, la politique monétaire mettant plusieurs trimestres à agir, surtout quand les agents économiques songent plutôt à se désendetter. En revanche, depuis décembre, les banques espagnoles et italiennes ont nettement accru leurs achats de titres d’État, ce qui était un des espoirs (non déclarés) de la BCE. Là aussi, c’est un succès. Dans les mois qui viennent, pourrait-on voir, comme aux États-Unis, des achats d’autres actifs, par exemple des matières premières ou des actions ? Ce n’est pas certain : aux États-Unis, la liquidité créée est « définitive », alors que la BCE n’a prêté que pour 3 ans. Y a-t-il un risque d’inflation ? Non, sans doute pas. Ces liquidités ne sont pas de la monnaie. Pour qu’elles aient un impact, il faudrait que ce montant soit retiré en billets, ce qui est improbable, ou que les banques distribuent du crédit au point que les réserves obligatoires (1 % des dépôts que créeraient ces crédits) absorbent ce montant. Cela supposerait une multiplication par dix des crédits, ou des dépôts. On aurait certes alors un danger d’inflation, mais cette hypothèse est très peu réaliste. On peut compter sur la BCE pour réagir bien avant : elle a tous les instruments pour cela.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº748