Toujours plus loin dans la protection des investisseurs ?

O&ugrave; en est le calendrier de la r&eacute;vision de la directive MIF 2 ? La fin de la consultation de la Commission europ&eacute;enne sur la r&eacute;vision de la directive MIF 2 lanc&eacute;e en d&eacute;cembre 2019 a &eacute;t&eacute; repouss&eacute;e du 20 avril 2020 au 18 juin 2020, compte tenu de la situation de pand&eacute;mie actuelle. Cette consultation inclut notamment des sujets prioritaires pour la Commission europ&eacute;enne en mati&egrave;re de protection des investisseurs qui pourraient se traduire par une initiative d&eacute;but 2021. Quels sont ces sujets prioritaires ? Outre la question fondamentale de savoir si, apr&egrave;s un retour d&rsquo;exp&eacute;rience de deux ans depuis l&rsquo;entr&eacute;e en vigueur de Mifid 2, l&rsquo;objectif initial d&rsquo;une meilleure protection des investisseurs a &eacute;t&eacute; atteint, des sujets plus cibl&eacute;s font encore d&eacute;bat. Le premier est la proposition d&rsquo;une interdiction pure et simple des commissions ou r&eacute;trocessions vers&eacute;es par des tiers aux conseillers sur la vente de produits dans le cadre des mandats entre producteurs et distributeurs. Celles-ci restaient jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;sent possibles pour les conseillers non ind&eacute;pendants et pour les conseillers qui se sont d&eacute;clar&eacute;s ind&eacute;pendants &agrave; condition de les reverser int&eacute;gralement aux clients finaux. Cette proposition, qui a fait l&rsquo;objet de d&eacute;bats tr&egrave;s soutenus au Conseil et au Parlement europ&eacute;ens lors de l&rsquo;adoption de Mifid 2, avait &eacute;t&eacute; pouss&eacute;e par les repr&eacute;sentants du Royaume-Uni ainsi que par les Pays-Bas, deux pays o&ugrave; cette interdiction est d&eacute;j&agrave; en vigueur. La France pour sa part estimait que cette mesure pourrait constituer un frein important &agrave; la distribution de produits financiers en architecture ouverte et aboutir &agrave; une offre r&eacute;duite de conseil, car si le conseiller n&rsquo;est pas r&eacute;mun&eacute;r&eacute; par la cha&icirc;ne d&rsquo;interm&eacute;diation, il devra l&rsquo;&ecirc;tre par les clients finaux ; or une partie de ces derniers ne semblent pas &ecirc;tre pr&ecirc;ts &agrave; accepter de payer une prestation de conseil. Une &eacute;tude men&eacute;e par un chercheur aux Pays-Bas conforte ce point de vue : elle montre que depuis que cette interdiction est en vigueur en Hollande, une partie des clients n&rsquo;a plus acc&egrave;s au conseil et que le nombre d&rsquo;incidents de clients qui se sont retrouv&eacute;s avec des produits financiers inadapt&eacute;s &agrave; leur profil de risque/aversion ou &agrave; leur horizon d&rsquo;investissement a cr&ucirc; de 15 %. Il est dommage que la Commission n&rsquo;ait pas r&eacute;fl&eacute;chi en contrepartie de cette interdiction, aux moyens de faciliter l&rsquo;acc&egrave;s pour les clients au conseil. Peut-&ecirc;tre faudrait-il adopter une position moins radicale, en s&rsquo;assurant qu&rsquo;une partie des r&eacute;trocessions vers&eacute;es permet de financer des programmes d&rsquo;&eacute;ducation financi&egrave;re, de fa&ccedil;on &agrave; former des consommateurs plus avertis face &agrave; leur conseiller. En outre, cette interdiction ne risque-t-elle pas s&rsquo;&eacute;tendre ensuite au r&eacute;gime d&rsquo;inducement concernant d&rsquo;autres services d&rsquo;investissement (des versements de tiers sont possibles s&rsquo;ils contribuent notamment &agrave; am&eacute;liorer la qualit&eacute; du service rendu et ne nuisent pas &agrave; l&rsquo;obligation d&rsquo;agir de mani&egrave;re honn&ecirc;te, loyale et professionnelle &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des clients) En lien avec la question du r&eacute;gime des inducements des conseillers, un point de discussion porte sur leur formation. La Commission propose la cr&eacute;ation d&rsquo;un examen commun au niveau europ&eacute;en, un objectif int&eacute;ressant mais sa mise en œuvre op&eacute;rationnelle devra &ecirc;tre pr&eacute;cis&eacute;e : quel est le niveau d&rsquo;&eacute;ducation &agrave; atteindre, quel d&eacute;nominateur commun des mati&egrave;res &agrave; prendre en compte&hellip; Autre sujet sensible, la cr&eacute;ation d&rsquo;une nouvelle cat&eacute;gorie de clients : aux clients de d&eacute;tail (retail), professionnels et contreparties &eacute;ligibles s&rsquo;ajouterait le client semi-professionnel. Cette proposition est soutenue par l&rsquo;Allemagne, Bundesbank en t&ecirc;te qui souhaite plus de granularit&eacute; dans la mise en œuvre des exigences de cat&eacute;gorisation clients et de gouvernance produits. Une partie des acteurs en Allemagne est convaincue que la cr&eacute;ation de cette nouvelle cat&eacute;gorie permettrait de toucher de nouvelles cibles avec la commercialisation de produits plus innovants et un peu plus complexes, par exemple aupr&egrave;s des clients plus jeunes des n&eacute;obanques, qui se caract&eacute;risent par leur comportement d&rsquo;early adopters. Cependant, tous les acteurs dans l&rsquo;Union europ&eacute;enne structurent et distribuent des produits financiers autour du triptyque clients de d&eacute;tail, client professionnel et contreparties &eacute;ligibles (une classification que l&rsquo;on retrouve par ailleurs dans de nombreuses r&eacute;gions du monde). L&rsquo;introduction d&rsquo;une quatri&egrave;me cat&eacute;gorie pourrait s&rsquo;av&eacute;rer compliqu&eacute;e et co&ucirc;teuse dans les syst&egrave;mes d&rsquo;information et les process et proc&eacute;dures, aujourd&rsquo;hui articul&eacute;s sur une classification en trois niveaux. La Commission europ&eacute;enne sugg&egrave;re d&rsquo;ailleurs elle-m&ecirc;me une proposition alternative, qui consisterait &agrave; revoir le seuil de qualification des clients professionnels : le crit&egrave;re du patrimoine financier minimum de 500 000 euros pourrait &ecirc;tre abaiss&eacute;, pour &eacute;largir la cat&eacute;gorie des clients professionnels. Y a-t-il d'autres points en discussion ? Concernant la gouvernance des produits financiers, producteurs et distributeurs doivent d&eacute;finir pour chacun d&rsquo;entre eux, outre un march&eacute; cible et une strat&eacute;gie de distribution, un march&eacute; cible n&eacute;gatif, c&rsquo;est-&agrave;-dire les investisseurs a priori non destinataires du produit. La Mifid 2 pr&eacute;voit qu&rsquo;un client qui s&rsquo;int&eacute;resse malgr&eacute; tout &agrave; ce type de produit doit &ecirc;tre inform&eacute; qu&rsquo;il ne se situe pas dans la cible pr&eacute;conis&eacute;e. L&rsquo;id&eacute;e serait d&rsquo;aller plus loin encore, en demandant de recueillir le consentement de l&rsquo;investisseur s&rsquo;il se positionne sur le produit. Mais selon les professionnels, cet accord suppl&eacute;mentaire &agrave; obtenir viendrait alourdir une exp&eacute;rience client d&eacute;j&agrave; tr&egrave;s balis&eacute;e. Enfin, l&rsquo;ESMA, &agrave; l&rsquo;occasion d&rsquo;une &eacute;tude men&eacute;e et publi&eacute;e sur les co&ucirc;ts et frais de la cha&icirc;ne d&rsquo;interm&eacute;diation des produits financiers, a fait le constat d&rsquo;une certaine opacit&eacute; et d&rsquo;un manque de comparabilit&eacute;. La Commission europ&eacute;enne sugg&egrave;re donc, au travers de sa consultation, de cr&eacute;er un outil de comparabilit&eacute; europ&eacute;en ; il serait g&eacute;r&eacute; par l&rsquo;ESMA et porterait en particulier sur les structures de co&ucirc;ts et charges des produits financiers. C'est un projet qui soul&egrave;ve de nombreuses interrogations :un tel comparatif doit-il relever d&rsquo;une initiative publique organis&eacute;e et g&eacute;r&eacute;e par une autorit&eacute; europ&eacute;enne ? Si oui, sur quels param&egrave;tres et crit&egrave;res l&rsquo;ESMA va-t-elle se fonder ? Quelles sont les ressources humaines et techniques &agrave; mettre en œuvre pour y parvenir ? Enfin, quels sont les avantages attendus ? Les professionnels ont d&eacute;sormais jusqu&rsquo;&agrave; mi-juin pour ajuster leurs r&eacute;ponses sur ces diff&eacute;rents points. Les d&eacute;bats seront certainement nourris.

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