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L'agence bancaire de demain dans une logique omnicanale

Réinventer notre métier afin de garder le maillage de notre territoire

Créé le

10.07.2019

-

Mis à jour le

12.07.2019

Le monde bancaire vit une transformation sans précèdent : tsunami réglementaire, concurrence protéiforme, marges contraintes, baisse de la fréquentation des agences physiques par les clients. Pour maintenir notre implantation, nos conseillers doivent apprendre à travailler différemment en ayant en permanence une logique omnicanale et notre concept d’agence bancaire se doit d’évoluer.

Dans les années à venir ce qui fera la différence entre les établissements bancaires est la force de l’humain et sa capacité à s’adapter en utilisant tous les moyens à sa disposition afin de maximiser la satisfaction de nos clients.

La stratégie du Crédit Agricole Centre Loire

A contrario, d’autres établissements bancaires, le Crédit Agricole Centre Loire a choisi de maintenir l’implantation de nombreuses agences sur le territoire malgré une forte baisse des flux en agence. Fin 2010, le projet d’entreprise du Groupe Crédit Agricole a eu comme ambition de devenir une référence des banques multicanales de proximité, en mettant en place un nouveau modèle de distribution qui conjugue le 100 % multicanal et le 100 % humain. Le nouveau « Projet client » du groupe réaffirme le rôle de l’humain en tant qu’empreinte de notre différenciation.

Compte tenu de ces choix stratégiques, et afin de maintenir notre rentabilité dans un environnement de plus en plus concurrentiel et évolutif, nos conseillers doivent apprendre à travailler différemment en ayant en permanence une logique omnicanale, notre concept d’agence bancaire se doit d’évoluer.

Les principales questions auxquelles nous devons répondre dans les années à venir sont :

– comment transformer nos conseillers en vendeurs connectés ?

– comment réaffirmer le rôle de l’humain au centre de notre modèle et comment renforcer le rôle de nos agences physiques ?

– quelle est la valeur ajoutée du Crédit Agricole Centre Loire perçue par le client ?

– quel pilotage commercial et quelle impulsion managériale pour mettre au centre le client et favoriser la transversalité et la complémentarité des différents canaux et des équipes de spécialistes autour du client ?

– comment se différencier de la concurrence et des nouveaux acteurs ?

La transformation du monde bancaire

Pour répondre à notre problématique, il faut commencer par comprendre les raisons de la transformation que nous sommes en train de vivre. L’évolution du système bancaire, l’évolution des attentes de nos collaborateurs, ainsi que l’évolution des attentes de nos clients et leur façon de rentrer en contact avec leur banque sont des éléments déterminants.

La société continue de se transformer, à côté du smartphone et du big data, apparaissent la blockchain et l’intelligence artificielle. La réglementation nous impose d’être de plus en plus transparents avec nos clients et vient supprimer des poches de PNB depuis longtemps acquises pour les banques. La conquête de nouveaux clients est de plus en plus compliquée et se fait souvent par le prêt habitat qui reste un produit d’appel à faible marge, voir à marge négative.

En parallèle de ces évolutions, les attentes des consommateurs évoluent – personnalisation, joignabilité, réactivité – font partie des exigences nouvelles (voir Figure 1). Pour pouvoir y répondre, les banques se réorganisent, de gros investissements sont faits dans le Big Data, l’intelligence artificielle, ou a minima des RPA [1] et des chatbots sont conçus pour assister nos conseillers.

Au-delà des transformations digitales et des nouveaux concurrents, les principes même de la finance, la notion de tiers de confiance, la notion de risque, la réglementation, sont en train d’évoluer.

La transformation des métiers bancaires

À l’horizon 2025, les métiers de la banque évolueront fortement. Une grande partie des fonctions de back-office disparaîtra au profit des fonctions de middle-office, les fonctions commerciales seront « augmentées » par l’intelligence artificielle. Les profils recherchés seront des profils atypiques capables de s’adapter à un monde bancaire en perpétuelle évolution.

L’essor du digital est une opportunité pour les banques universelles de proximité de capitaliser sur les innovations technologiques pour renouveler leur modèle et augmenter leur rentabilité. D’après une étude de l’observatoire des métiers de la banque, les « personnes âgées aujourd’hui entre 20 et 35 ans constitueront 50 % des travailleurs en 2020 ». Cette génération est née avec Internet et est marquée par les nouvelles technologies ; le fonctionnement en réseau est plus valorisé que le fonctionnement hiérarchique, l’équilibre vie privée vie professionnelle est très important. 92 % d’entre eux refusent les résultats comme seul indicateur de performance. Les critères qualitatifs sont tout aussi importants. Le corps managérial devra adapter son style de management ainsi que sa façon de piloter ces équipes (voir Figure 2).

Des interactions nouvelles entre le client et son conseiller

En parallèle, la fréquentation des agences continue à baisser : « 20 % des Français déclarent fréquenter plusieurs fois par mois leur agence en 2016, contre 62 % en 2007 », mais les contacts avec la banque n’ont jamais été si nombreux. Nous estimons à environ 170 contacts par an avec sa banque entre les RDV physiques, les échanges téléphoniques et les mails.

Les contacts avec le conseiller représentent uniquement 7 % des contacts, dont la moitié à distance et 11 % si on rajoute les contacts avec le personnel de l’accueil. Le canal des Centres de Relation Clientèle est, quant à lui, très peu utilisé (moins de 2 % des contacts). Les contacts humains ne représentent plus que 15 % des contacts et pour être efficaces, les conseillers doivent maîtriser autant le rendez-vous physique que les rendez-vous à distance.

Même si les Français gardent un attachement fort à leur agence bancaire, 85 % des interactions s’effectuent désormais en digital, ce qui oblige les établissements bancaires à remodeler leur réseau d’agences (voir Figure 3).

Ceci renforce la stratégie des banques de détail d’investir dans la transformation de leur distribution à l’aide du digital afin de rendre possibles les opérations simples à distance et concentrer les interactions humaines aux opérations à valeur ajoutée. Un modèle de banque omnicanale performant devrait faciliter le parcours client afin de passer d’un canal à l’autre de manière fluide et s’orienter vers son canal préféré en fonction de son besoin.

Qu’attendent nos clients ?

Lorsqu’ils se déplacent dans nos points de vente, nos clients sont très sensibles à l’accueil qui leur est réservé. L’agence n’est rien sans ses conseillers, leur sens de l’accueil, leur sourire et leur capacité d’écouter et résoudre les problématiques (voir Figure 4).

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Dans son livre, Le Vendeur connecté, Benoît Mahé [2] recueille 12 caractéristiques nécessaires aux vendeurs pour réussir dans le monde de demain. Parmi ces 12 caractéristiques, j’en identifie 6 qui seront indispensables à notre conseiller bancaire.

1. « Le vendeur connecté émerveille le client et lui fait vivre une expérience d’achat unique et inoubliable. » Le changement de comportement des clients avec une communication libre sur la toile autour de son expérience d’achat, a augmenté le pouvoir du consommateur et nous a amenés à changer la façon de mesurer la satisfaction client. Toutes les banques sont passées d’un suivi de la satisfaction client en note moyenne, à un suivi de l’Indice de Recommandation Client (IRE) qui permet de mesurer l’écart entre les clients qui sont promoteurs et les clients qui sont détracteurs. Pour les fidéliser, il ne s’agit plus de les empêcher de partir, mais de les engager à nous recommander et à augmenter la notoriété de la marque.

2. « Le vendeur connecté assume qu’il est la pierre angulaire de la stratégie omnicanale et phygitale. » Malgré les évolutions des dernières années, la tendance n’est pas à la disparition de l’humain dans le commerce, mais à la transformation de son rôle. Quand un client se déplace en boutique, il ne vient plus pour ses opérations simples mais pour l’échange qu’il peut avoir avec son conseiller. Si « la chimie n’opère pas à la rencontre de la personne, les autres canaux ne serviront à rien [3] ».

3. « Le vendeur est connecté aux outils numériques en magasins » (tablettes, kiosques, Smartphone…). » Depuis plusieurs années, la tablette s’est imposée comme outil dans le cadre des rendez-vous clients et en tant qu’outil d’aide à la vente partagée avec les clients. Pour y arriver, un pilotage rapproché des équipes a été nécessaire et ce suivi s’impose à chaque nouvelle fonctionnalité pour lever les freins des commerciaux. Son intégration dans la « cérémonie de vente » doit se faire naturellement, la tablette ne doit pas devenir une barrière physique entre le conseiller et le client.

4. « Le vendeur connecté sait convertir le big data en small data… en human data. » La banque dispose d’une multitude de sources de données sur ses clients. Si ces données étaient peu exploitées auparavant, les banques se penchent sur ce sujet afin de fidéliser leurs clients. La personnalisation de la relation client ne peut se faire que par l’exploitation de cette donnée, mise à disposition du conseiller sous une forme simple et compréhensible. Pour obtenir l’effet escompté, le conseiller doit utiliser ces informations avec intelligence dans le cadre de ses interactions avec le client. Toute cette mine d’or ne sert à rien si elle n’est pas alimentée et actualisée en continu par nos conseillers (ex. les hobbies d’un client et surtout ses projets) et si elle n’est pas utilisée au bon moment.

5. « Le vendeur connecté se sent autonome et reconnu : cela le rend crédible et responsable aux yeux du client. » Pour que nos conseillers soit crédibles devant les clients, ils doivent se sentir autonomes dans leur activité et assumer les décisions qu’ils donnent au client. Le manager doit être capable de fixer des objectifs « smart », motivants et atteignables par la force de vente. En parallèle, les délégations doivent lui permettre de prendre la majorité des décisions à son niveau ou avec son manager direct.

L’empathie et l’intelligence situationnelle sont des qualités essentielles, qui l’aideront à créer une relation de qualité avec son client.

6. Dans la banque de demain, les compétences comportementales prendront le dessus sur les compétences techniques. Le profil requis sera une personne adaptable, capable d’apprendre et doté d’un sens inné du service client.

Les clés du succès de la stratégie omnicanale

Les clés du succès de la stratégie omnicanale sont :

– inculquer la culture du service pour maximiser la satisfaction client ;

– faire évoluer les méthodes de formation : stop au e-learning, bienvenue au adaptative learning ;

– accélérer les investissements technologiques pour une hyperpersonnalisation de la relation client ;

– repenser nos processus internes et les adapter en continu pour maximiser l’IRE de nos collaborateurs ;

– faire évoluer notre pilotage commercial en partant du client et non pas du conseiller ;

– ne pas empiler la technologie ;

– apprendre à partager le client ;

– ne pas opposer humain et digital, mais plutôt mettre le digital au service de l’humain pour mieux servir son client.

En conclusion

Pour garder le maillage de notre territoire, tout en travaillant dans une logique omnicanale et en maximisant la satisfaction client, nous devons capitaliser sur nos valeurs : l’humain, la proximité, le service client.

Lorsqu’on mesure les éléments les plus déterminants dans la relation d’un client avec sa banque, la qualité des relations humaines occupe la première place. Un client est beaucoup plus attaché à son conseiller qu’à sa banque, car c’est bien le conseiller qui incarne les valeurs du Crédit Agricole Centre Loire auprès des clients. « Les meilleures banques seront celles qui parviendront à combiner, au sein de parcours clients réinventés, la réactivité et l’efficacité du digital avec une qualité relationnelle, humaine supérieure » [4] .

 

1 Robotic Process Automation.
2 B. Mahé (2018), Le Vendeur connecté : coaching et relation client à l’ère de l’omnicanal, Maxima-Laurent du Mesnil.
3  Ibid.
4 P. Dessertine, J.-B. Mateu et Le cercle Turgot (2018), Les Banques face à leur avenir proche : les banques, miroirs d’un nouveau monde, Eyrolles.
 

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nºcfpb2019
Notes :
1 Robotic Process Automation.
2 B. Mahé (2018), Le Vendeur connecté : coaching et relation client à l’ère de l’omnicanal, Maxima-Laurent du Mesnil.
3  Ibid.
4 P. Dessertine, J.-B. Mateu et Le cercle Turgot (2018), Les Banques face à leur avenir proche : les banques, miroirs d’un nouveau monde, Eyrolles.
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