Alors qu'il y a deux ans, les banques semblaient encore hésitantes à l'égard des
Inscrire les réseaux sociaux dans la stratégie multicanal
Édouard Bouthors, manager en charge des stratégies multicanal chez CSA consulting, constate tout de même une évolution commune à l’ensemble des banques : « Il y a une sorte de trajectoire suivie par la plupart des banques, au-delà de la méthodologie des bonnes pratiques : écouter la communauté avant d’intervenir. Les banques sont allées sur les réseaux sociaux par besoin de maîtriser leur e-réputation et de répondre à des messages négatifs. Ensuite, c’est encore principalement utilisé en termes d’image, notamment pour le mécénat et le sponsoring (sport, cinéma, musique). Les médias sociaux sont un canal comme les autres. De même pour la place des banques en tant que recruteur et employeur avec des réseaux comme Viadeo ou LinkedIn, mais aussi Facebook, Twitter. Il y a une marche un peu plus dure à franchir en intégrant les réseaux sociaux dans la relation client. Les banques s’y penchent depuis des années, mais il faut un investissement important et impliquer les dirigeants. Certaines banques ont un fil Twitter dédié (Société Générale, BNP), mais nous n’en sommes qu’au début. Il faut aussi intégrer les médias sociaux dans la stratégie multicanal d’une banque et non pas le traiter dans un silo indépendant. »
Pour Gabriel Morin, associé en banque chez KPMG, il y a trois grands aspects qui régissent l’interaction entre les banques et les réseaux sociaux : « Il y a en premier un rôle commercial classique : les réseaux sociaux permettent de suivre des clients de façon plus proche, plus intelligente, plus complémentaire, de lancer des contrebuzz, d’avoir des stratégies de niche, et de toucher des générations qui vont moins en agence, utilisent moins le téléphone ou le mail, mais sont plus utilisateurs de SMS et réseaux sociaux. Il faut être au plus près du principe de décision dans le choix d’une banque. Il y a ensuite un aspect risque : la banque doit s’assurer qu’en interne, ils ne prennent pas des employés qui ne sont pas “clean” sur les réseaux sociaux. De même, les gens qui communiquent pour la banque sur les réseaux sociaux doivent avoir des informations fiables. Il y a enfin l’aspect gouvernance : les banques doivent mettre en place une stratégie autour des réseaux sociaux que les organes dirigeants de la banque doivent s’approprier. D u fait des réseaux sociaux, l a banque n’est plus complètement propriétaire de son image. » Avec ces observations en tête, chaque banque a sa propre approche des réseaux sociaux.
L’omniprésence de BNP Paribas
Julie London, responsable du marketing 2.0 pour la banque en ligne chez BNP-Paribas, nous explique comment cela fonctionne : « BNP Paribas est présent sur les réseaux sociaux depuis 2009. Nous sommes de plus en plus dans l'échange et la relation client sur Facebook ou Twitter, avec des chats dédiés sur notre site bnpparibas.net, une application facebook “besoin d'aide” et une page Twitter SAV. Nous avons référencé nos 2 250 agences sur Foursquare. Nous avons de plus en plus de questions de banque au quotidien. Nous avons amorcé la page Fan, avec des événements cinéma et tennis, et au fil des mois, c’est devenu un nouveau canal d’échange avec nos clients. Les aspects sécuritaires sont très importants : nous n’échangeons aucune information confidentielle sur les réseaux sociaux. Nous ne demandons pas plus que nom, prénom, ou date de naissance en message privé. Nous répondons ainsi à 75 % des questions posées sur Twitter sans avoir besoin d'identifier davantage l'internaute et nous invitons ce dernier à continuer la relation sur un canal sécurisé du site internet bnpparibas.net. Nous sommes une banque et cela fait la différence. »
Le tri sélectif de Société Générale
Pour Jean-Paul Chapon, en charge de la Web Governance et de l’entreprise 2.0 de Société Générale, « la question ne se pose plus de savoir s’il faut être sur les réseaux sociaux. C’est une opportunité immense, mais également des risques. Nous ne sommes pas présents partout. Sur Facebook, nous n’avons pas de page corporate, mais plus une présence affinitaire ou communautaire (Par amour du rugby, So Music, etc.). Sur Twitter, nous avons principalement un compte pour diffuser des informations sur le groupe et tweeter des événements en direct et un compte pour la relation client. Sur les réseaux sociaux, nous rencontrons toutes nos audiences : clients, salariés, journalistes… et ce sont autant d’opportunités pour nous. Ne pas être dessus est un risque aujourd’hui, le risque de laisser se développer une image et des messages négatifs sur la banque. À chaque fois que nous sommes présents sur un réseau social, nous voulons en tirer le meilleur. » Pour cela, en dehors des ressources humaines qui explorent les réseaux sociaux à leur
La prudence de Crédit Agricole SA
Comment cela se passe-t-il dans une banque mutualiste ? Si chaque caisse régionale a une grande autonomie, au Crédit Agricole, la communication centralisée passe par CASA. « Nous sommes sur les réseaux sociaux pour toucher à la fois des clients, des leaders d’opinion et des futurs salariés. Les outils que nous utilisons sont adaptés à ces cibles » explique Denis Marquet, directeur de communication de Crédit Agricole SA. « Twitter, par exemple, nous sert à toucher les leaders d’opinion, notamment des journalistes, investisseurs, analystes. Nous l’utilisons pour donner une information rapide non connue. Ce n’est pas un outil que nous utilisons pour entrer en relation. Nous avons une politique d’animation en interne, avec des compétences de community management proches de celles des attachés de presse, car le discours est souvent commun dans les deux cas. Pour nous adresser à d’autres cibles de niche, nous avons une page Facebook qui concerne tous les sujets de type RSE (responsabilité sociale des entreprises). Il s’agit d’inviter à dialoguer autour de notre politique de mécénat, nos valeurs, etc. Dans ce cas, Facebook est lié à un événement ou à un moment où vous pouvez exprimer votre affinité à la marque. Nous avons beaucoup de salariés de l’entreprise sur Facebook qui sont intéressés par les sujets de citoyenneté du groupe. En ce qui concerne les clients, il y a une vraie discussion qui s’est enclenchée sur les réseaux sociaux, surtout via Facebook.
Par ailleurs, il est important d’avoir un système de veille extrêmement pointu sur les réseaux sociaux. Les banques étant très critiquées, il faut savoir repérer les signaux faibles, pour calmer une polémique, une rumeur ou une fausse information si l’on veut préserver son image. Ensuite, il faut savoir diffuser l’information ; enfin il faut être en conversation avec ses publics. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de gens regardent mais peu parlent. Parmi ceux qui parlent, il y a les trolls agressifs. Faut-il entrer en relation avec un troll ? Personnellement je ne le pense pas. Nous avons un principe : nous ne répondons jamais à une insulte. Pour le reste, nous répondons à tous les besoins d’explication, même un peu véhéments. »
Une approche pédagogique pour le Crédit Foncier
À l’inverse, pour une banque au périmètre d’action très focalisé comme le Crédit Foncier, la communication sur les réseaux sociaux fait partie du business.
Bruno Lorthiois, directeur Communication externe
Nous avons une équipe de trois personnes dédiée au digital sans compter celle de l’activité relations médias qui travaille en étroite collaboration avec elle : que dit-on de l’entreprise, quelles réponses apportons-nous, quel message souhaite-t-on délivrer, comment et avec quel contenu ? Nous avons une approche clairement sélective et à cet effet nos tweets se focalisent sur les principaux sujets d’actualité du Crédit Foncier. Les équipes de la direction du marketing ont développé une application Crédit Foncier sur i-phone, “Projet Immo”, mais nous n’avons pas encore développé d’outils ou d’approche commerciale fondés sur les réseaux sociaux. Il faut dire qu’au Crédit Foncier, avec son réseau de près de 220 agences sur toute la France, la relation interpersonnelle prime, d’autant plus que nous ne vendons pas de produits de grande consommation, mais mettons en place des solutions de financement. »