Avec un taux de bancarisation de 99 %, la France semble peu concernée par les questions d’inclusion bancaire. Qui sont les personnes concernées et quelle définition donner des « populations fragiles » ?
La problématique d’inclusion bancaire en France ne porte pas tant sur l’accès au compte que sur la qualité de son usage. Nous constatons des personnes qui font face à des frais d’incidents et des commissions d’intervention importants, qui se retrouvent fréquemment inscrits au
Le projet de loi bancaire prévoit un plafonnement des commissions d’intervention pour ces populations fragiles…
C’est une option en effet, sous réserve d’un nombre d’interventions limité. Mais la première étape reste de définir qui sont les populations fragiles, faute de quoi, le Conseil d’État ne pourrait accepter la proposition. Cette définition pourrait faire l’objet d’un décret, mais comme elle ne peut être normative, je crois bien plus à la création de l’
Le gouvernement a annoncé la création d’un
Nous avons besoin de cet outil pour compléter l’action en matière de prévention du surendettement. En particulier, le fichier positif permettra d’éviter le « mal-endettement ». Je pense, et c’est également la position de la Banque Postale et du Crédit Mutuel, que nous ne disposons pas d’outils de prévention dans le cas de personnes issues de la classe moyenne qui, face aux besoins de la vie quotidienne, croient que l’emprunt est la solution… alors que des alternatives existent. Les banques doivent mettre en place des systèmes de détection. Nous avons également proposé la création de Points Conseil Budget : les banques pourraient y orienter le client auquel elles refusent un crédit.
Le contenu d’un tel fichier positif fait depuis longtemps débat. Quels crédits devraient y apparaître ?
Tous, y compris le crédit renouvelable. La question est plutôt de savoir quels montants prendre en compte. Faire remonter l’encours de manière systématique nécessite une machinerie complexe pour une utilité qui ne mériterait peut-être pas de tels coûts de fonctionnement ; faire apparaître les montants initiaux seulement pourrait être une solution. Cela reste à trancher.
Qu’en est-il des dettes vis-à-vis d’organismes non financiers ?
C’est là qu’interviennent les Points Conseil Budget. La détection des incidents doit être également mise en place aux niveaux des organismes comme EDF, GDF Suez ou les bailleurs sociaux. En revanche, la question des dettes énergétiques hors électricité et gaz, en particulier le mazout, reste entière du fait de l’éclatement des interlocuteurs.
Dans votre rapport, vous donnez des exemples de bonnes pratiques au niveau du secteur bancaire. En quoi consistent-elles ?
Les banques que je cite donnent la possibilité aux personnes qui rencontrent des incidents à répétition d’aller consulter des structures d’accompagnement (Points passerelles du Crédit Agricole, projet REFLEX de la Banque Postale, Points Solutions Surendettement du Crédit Municipal de Paris…). Celles-ci sont plus ou moins liées aux banques elles-mêmes. Ces initiatives, bien qu’un peu disparates, tournent autour de la même idée : accompagner la personne en difficulté pour comprendre ce qui lui arrive et l’aider à s’en sortir par un changement de comportement. Elles participent à la mission de détection des personnes à risque par les banques.
Les Points Conseil Budget ne remplaceraient-ils pas ces initiatives ?
Il me semble important que l’on n’enlève pas aux banques leur métier et leur responsabilité. Je ne souhaite donc pas que ces Points soient très éloignés de la fonction bancaire. Il en va de même pour le microcrédit : je pense qu’il devrait rester dans le giron des banques, même s’il est appuyé par d’autres organismes. La fonction bancaire est une fonction noble et elle doit assumer ses responsabilités dans leur totalité.
La consultation des Points Conseils Budget se fera sur la base du volontariat pour les personnes en difficulté. N’est-ce pas une limite à leur champ d’action ?
Les établissements devront proposer la solution, mais ce sera effectivement un acte volontaire du client. Cela limite bien sûr la portée du dispositif, mais les débats sont les mêmes qu’en ce qui concerne la gamme des moyens de paiement alternatifs (GPA), qui reste optionnelle. En revanche, la GPA devrait être proposée bien plus en amont qu’actuellement, dès l’apparition des premières difficultés. Elle se développerait ainsi beaucoup plus et n’en serait que moins stigmatisante.