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Assurances IARD : le fruit convoité par les bancassureurs

Créé le

25.04.2011

-

Mis à jour le

25.06.2012

La performance commerciale alliée à l'industrialisation des processus a permis aux bancassureurs de conquérir 10 % du marché de l'assurance dommages. Ce n'est qu'un début…

Dans la concurrence de plus en plus vive qui oppose bancassureurs et assureurs, le marché de l’assurance dommages est un morceau de choix. 2010 a vu les positions des bancassureurs confortées : en assurance automobile, les cotisations totales s’élèvent à 1,676 ​milliard d’euros, en progression de 8 %, contre 2 % pour l’ensemble du marché. En multirisque habitation (MRH), les bancassureurs ont recueilli 1,242 milliard d’euros de cotisations, soit une augmentation de 12 %, contre 5 % pour l’ensemble du marché [1] .

Les raisons du succès

Les assureurs ont longtemps pensé que la fréquence des contacts, beaucoup plus importante entre un banquier et son client, était à l’origine du succès de la bancassurance. Maxime Letribot, associé chez Eurogroup Consulting, pense que les causes sont à rechercher ailleurs : « À vouloir trop l’industrialiser, les banques ont fortement dégradé ces dernières années la qualité de leur relation client, mais elles conservent une force de frappe importante de par la supériorité numéraire de leur réseau et leur rapport de force vis-à-vis des clients sur les prêts, en ces temps difficiles. »

Les bancassureurs disposent également d’un produit d’appel phare avec le crédit immobilier, qui leur donne un pouvoir de négociation supérieur à celui des assureurs. « Certaines banques vendent des crédits immobiliers à perte pour fidéliser leurs clients ou pour attirer de nouveaux clients [2] [3] », explique Cyrille Chartier-Kastler.

Il leur est donc plus facile de proposer une assurance MRH aux souscripteurs de prêts immobiliers. La preuve en est, continue Maxime Letribot, que « les bancassureurs ont un portefeuille de multirisque habitation supérieur au portefeuille automobile, ce qui n’existait pas auparavant chez les assureurs historiques. Dans l’assurance, on acquiert le client sur l’automobile, et on va ensuite chercher les autres contrats. Chez les bancassureurs, c’est l’inverse. »

En outre, les bancassureurs se sont positionnés dans une gamme tarifaire intermédiaire située entre les mutuelles sans intermédiaires (MSI) et les réseaux d'agents. Leur secret ? Des produits standardisés, et la mise en place de plateaux de gestion des sinistres propres à la compagnie d'assurance et extérieurs à la banque. «  Dans le règlement des sinistres, les compagnies n’interfèrent pas avec la gestion bancaire et leur bon fonctionnement est positif pour l’image du groupe », explique Jean Vecchierini de Matra, délégué général du groupement français des bancassureurs.

Un business model solide

La performance commerciale alliée à la capacité d’organisation des banques laisse présager une progression rapide des parts de marché des bancassureurs au cours des prochaines années : outre les deux bancassureurs « historiques » que sont le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel, les autres sociétés se mettent en ordre de marche pour améliorer encore leurs résultats.

BNP Paribas a lancé un vaste plan de croissance accélérée (P2A), pour se repositionner sur l’assurance non-vie en France. Société Générale Insurance, après avoir racheté les 35 % qu’Aviva détenait dans Soggessur, sa filiale d’assurance dommages, a également annoncé un vaste plan de relance de son activité dans les dommages. L’inconnue reste la réussite de La Banque Postale sur ce marché ; l’offre dommages pour les particuliers doit être commercialisée dans le réseau d’agences à partir de la fin du mois de mai ​2011.

« Des acteurs comme la Caisse d’Épargne, BNP ou la Société Générale sont tout à fait en capacité de doubler leur activité à 10 ans. Si La Banque Postale, en sus, atteint son objectif de parts de marché de 3 à 5 % à 10 ans, les bancassureurs pourraient bien représenter 20 % du marché de l’assurance non-vie à 10 ans, contre 10 % actuellement », explique Antoine Fournier, directeur chez Exton Consulting.

Quelles conséquences pour les offres ?

Cette concurrence accrue va favoriser la segmentation de ce marché de masse qui devrait selon Eurogroup se décomposer d’ici à 2015 de la manière suivante (voir Encadré) :

  • Un marché « de commodités » avec des offres encore plus standardisées qu’aujourd’hui, et dans une logique de self-care. Ces produits, essentiellement vendus par des compagnies low-cost, devraient représenter 1/3 ​du marché dans 5 à 10 ​ans.
  • Un marché d’exigences, en termes de services et de produits, qui visera des clients en attente de services et de conseils à valeur ajoutée, assortis d’un modèle relationnel étendu avec leur assureur. Eurogroup évalue ces offres à 1/4, voire 1/3 du marché. Ces marchés sont ciblés par les grandes compagnies traditionnelles avec des réseaux d’agents généraux.
  • Le marché de masse actuel, le « ventre mou » des clients indifférents, va continuer à se contracter. Les agents commencent à avoir du mal à justifier de leurs tarifs plus élevés sur des produits extrêmement standardisés. Ce marché sera l’apanage des bancassureurs.
1 Source : Groupement français des bancassureurs. 2 Une pratique dont les risques ont été mis en exergue le 31 mars 2011 par Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, à l’occasion de la présentation du rapport annuel de l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP). 3 Une pratique dont les risques ont été mis en exergue le 31 mars 2011 par Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, à l’occasion de la présentation du rapport annuel de l’ACP.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº736
Notes :
1 Source : Groupement français des bancassureurs.
2 Une pratique dont les risques ont été mis en exergue le 31 mars 2011 par Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, à l’occasion de la présentation du rapport annuel de l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP).
3 Une pratique dont les risques ont été mis en exergue le 31 mars 2011 par Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, à l’occasion de la présentation du rapport annuel de l’ACP.