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Les assurtechs, un feu de paille ?

Créé le

22.03.2022

Portées par les nouvelles technologies, les start-up de l’assurance occupent l’espace médiatique. Certains les voient supplanter aisément et rapidement les assureurs « traditionnels ». Mais elles sont elles-mêmes contrées par les multiples barrières à l’entrée de l’activité d’assurance et par leur fragilité financière. Et si elles n’étaient que des assureurs éphémères ?

Les assurtechs reposent-elles sur des fondations solides ? L’analyse classique SWOT faite par A. Capella Consulting permet d’avoir quelques éléments de réponse. Leurs forces ? Une compétence technologique qui leur donne l’agilité, une expérience du client mobile et digitale, des produits et services adaptés aux besoins des clients et une efficacité certaine dans la gestion des services. Leurs faiblesses sont symétriques : mauvaise connaissance du marché de l’assurance, faibles retours des clients, concentration sur la clientèle de la génération connectée, faiblesse capitalistique.

Côté opportunités, il y a l’affirmation sur le marché de cette génération connectée, soucieuse de gain de temps et l’ouverture de nouvelles niches assurables, avec des nouveaux produits et services. Enfin, les menaces sont liées à la crise possible du pouvoir d’achat, à la réaction des assureurs traditionnels et au déploiement des GAFAM sur le marché de l’assurance.

Délicates levées de fonds

Pour exister, ces start-up ont besoin de financement, notamment de fonds propres. Elles vendent donc une « idée » (un processus, un produit, un service) qui révolutionnera l’assurance. Les investisseurs peuvent se montrer réticents ou très prudents, car ces jeunes entreprises manquent de notoriété et ne disposent pas, pour la plupart, d’un agrément des Autorités de contrôle. Le caractère innovant des projets est en soi un obstacle. Rien ne prédit que le projet fonctionnera à coup sûr et le montant des investissements peut être plus important que prévu. La conviction des investisseurs requiert des efforts de transparence de la part des assurtechs et il faut souvent trois, voire quatre essais pour obtenir la levée de fonds nécessaires au démarrage du projet.

Pour atteindre le seuil d’un demi-million d’euros, il faut en moyenne une quinzaine d’investisseurs. Or, les innovations sont coûteuses et doivent être revues fréquemment, sur un marché saturé où la concurrence est forte. Sans oublier le coût de mise en place de la protection des données et la sécurisation des systèmes contre le risque de piratage. La crise sanitaire a ralenti les levées de fonds, tandis que les investisseurs faisaient face à d’autres priorités que l’innovation dans l’assurance. Lorsque les investisseurs sont, comme souvent, des assureurs traditionnels, ceux-ci ont consacré leurs efforts depuis deux ans, à la digitalisation de leurs procédures pour répondre aux besoins de leurs clients. Devant le risque d’une baisse des résultats techniques, les assureurs tendent aussi à conforter leurs fonds propres et leur marge de solvabilité plutôt qu’à investir dans des innovations à rentabilité incertaine ou lointaine.

Un agrément difficile à obtenir

Quel que soit l’environnement, le niveau de fonds propres nécessaires pour obtenir l’agrément est élevé. À ce jour, seuls « Alan » en santé et Seyna en assurances dommage l’ont obtenu, grâce à une levée de fonds de 50 M€ en 2020. Plutôt que d’exercer pleinement, les assurtechs adoptent donc plutôt le statut d’intermédiaires en assurances. L’occasion de faire porter le risque par un assureur traditionnel partenaire. Cela ne les exonère toutefois pas de respecter les autres réglementations de l’assurance, en particulier le Règlement général de la protection des données personnelles (RGPD) et la Directive sur la distribution de l’assurance (DDA).

Or, les assurtechs sont composés d’ingénieurs, de développeurs, de commerciaux, mais rarement d’assureurs. Leur connaissance de la réglementation du métier (distribution) et des risques (RC Auto par exemple) est relativement faible ou insuffisante. Le soutien de professionnels du risque, de la conformité aux règles de la distribution et de la protection des données est indispensable, dans une démarche où l’innovation sur les produits et les services est fondamentale. À noter que le niveau des amendes que pourrait prononcer l’ACPR à l’encontre d’une assurtech est tel qu’il pourrait conduire à la disparition de la société.

L’expertise digitale

Ce principe de leur modèle d’affaires fait que les assurtechs sont dédiées et centrées sur le numérique, donc sur les nouvelles technologies : Intelligence artificielle, méga-données, blockchain et objets connectés. Il s’agit de mieux connaître, voire d’anticiper la demande des clients et d’accélérer la gestion des dossiers. Le tout doit permettre de proposer des contrats d’assurance à prix plus compétitifs que les produits des compagnies traditionnelles.

Les assurtechs misent donc sur la qualité de la relation client. Elles proposent des parcours 100 % digitaux avec des processus intuitifs pour répondre aux besoins des consommateurs et à leurs nouveaux modes d’utilisation de l’assurance. Elles mettent à disposition des assurés des outils technologiques tels que les chatbots capables de répondre à toutes les questions des clients et à tout moment. Elles disposent de données en quantité et qualité suffisantes pour pouvoir proposer des contrats personnalisés.

Malheureusement, ces nouveaux acteurs n’apportent que peu ou pas d’innovation dans les produits eux-mêmes. Leurs contrats auto ou habitation proposent les mêmes garanties, exclusions ou formules d’assurance que les contrats des assureurs traditionnels. Les assurtechs ont pour seul objectif la distribution, avec le 100 % en ligne et la qualité (la rapidité) des services. Cet avantage compétitif peut limiter une action commerciale concentrée sur les « digital natives » ou les générations les plus jeunes. Une dynamique qui écarte les personnes qui, pour de nombreuses raisons, ne veulent pas souscrire un contrat d’assurance en ligne. D’autant plus que la complexité inhérente au contrat d’assurance fait que nombre de clients veulent obtenir un conseil humain et personnalisé et non, une réponse issue de l’intelligence artificielle et d’un chatbot. Pour accroître leur portefeuille de clients, les assurtechs ne peuvent s’en tenir à leur approche technologique. Elles doivent apporter une personnalisation innovante des produits eux-mêmes.

Toujours pas de rentabilité

Depuis leur lancement, la plupart des assurtechs n’ont pas atteint le point mort de leur exploitation, souvent du fait du poids des investissements. Alan n’a pas été bénéficiaire depuis sa création en 2016. Il espère l’être dans un délai de deux à trois ans en France et en Europe dans quatre ou cinq ans. Idem même pour Luko qui compte pourtant 100 000 assurés en Assurance Habitation.

Cette sous-performance s’explique en partie par la méconnaissance des start-up par le grand public. Le manque d’expérience et le manque de soutien par les avis de clients ont un effet négatif sur la confiance. Par ailleurs, les start-up travaillent dans un secteur saturé et lourdement concurrentiel. Les compagnies traditionnelles consentent aussi des efforts de digitalisation et d’accès amélioré des clients, avec les chatbots notamment poussés par les nécessités liées à l’épidémie.

Les assurtechs se livrent aussi à une vigoureuse concurrence entre elles, justement sur le créneau du 100 % digital, avec des produits d’assurance peu différenciés. Elles ont en outre des difficultés dans le B to C, soit la conception de produits à destination du grand public, mis sur des plateformes auxquels accèdent les clients. Mais cette démarche est souvent peu rémunérée, surtout si les assurtechs ne sont pas propriétaires et gestionnaires de la plate-forme.

Une trop faible volumétrie

À la clef une faible volumétrie. Fizzy proposait une assurance contre les retards de vols aériens fondés sur des « smart contracts » gérés par la technologie blockchain, mais elle n’a pu développer des partenariats lui permettant de couvrir les vols internationaux. Elle a par ailleurs imposé une franchise de retard de deux heures. C’est beaucoup ! Valeo proposait une assurance « à la demande » pour des objets de valeur contre le vol, la casse, l’oxydation et une estimation des biens avant leur vente ou leur location.

Dans les deux cas, l’innovation n’a pas trouvé un marché de taille suffisante pour atteindre la rentabilité. Soit le produit était trop innovant, soit « le hasard moral » ou l’anti-sélection était fort (objets exposés à des vols fréquents, retards prévisibles des compagnies aériennes), soit les assurtechs ne disposaient pas du concours des réseaux de vente de leurs propres partenaires assureurs.

Les compagnies traditionnelles, justement ! Elles ont beaucoup à recevoir des assurtechs, notamment dans la maîtrise et l’utilisation des nouvelles technologies. Elles en ont besoin pour évoluer dans tous les domaines, afin de lutter contre l’obsolescence et plus encore, pour maintenir leur réputation sur le marché. Elles n’hésitent donc pas à créer des structures en interne, dotées de moyens importants pour investir par étapes dans les start-up. Ces structures telles que le Fonds « Allianz X » centré sur le numérique ou Axa Venture Partners ont pour but de développer une bonne relation commerciale entre les partenaires et d’inclure des collaborateurs des compagnies d’assurance pour échanger avec les assurtechs et définir des intérêts communs.

L’atout des partenariats

Les assurtechs partenaires apportent la « culture de la Data », considérée comme des actifs par les start-up et que l’intelligence artificielle permet de développer. Pour Tanguy Lemaire (interview sur Linkedin le 12 février 2021) de Generali, le partenariat avec les assurtechs est centré sur le transfert de connaissance. Les assurtechs se concentrent sur l’un des éléments de la chaîne de valeur, en facilitant sa digitalisation. Elles développent les outils d’intelligence artificielle pour analyser les données et répondre à l’évolution du comportement des clients, en proposant une offre de contrats et de services personnalisée. Enfin, l’intelligence artificielle est développée pour identifier les risques et prévenir ou détecter la fraude.

Le partenariat est aussi une opportunité pour les start-up. Les assureurs disposent des moyens financiers de développement des idées technologiques des start-up. Les assurtechs y gagnent en notoriété. Elles n’ont pas besoin de lever des fonds pour pouvoir porter les risques qui sont souscrits par les assureurs et peuvent donc s’en tenir au rôle de courtier et éviter de demander et de financer l’agrément de l’ACPR en tant que compagnie d’assurance.

Plus d’atouts pour les assureurs traditionnels

Les assurtechs ont du mal à être une menace pour les assureurs ? Qu’en est-il de la question inverse ? L’analyse SWOT des assureurs traditionnels du Cabinet A. Capella Consulting peut le laisser penser. La force des assureurs ? Leur installation sur le marché, leur notoriété, leur capacité financière, leur connaissance du métier et des réglementations, l’amplitude et la solidité de leur base de clientèle. Leurs faiblesses ? La qualité du service client, la méconnaissance des nouvelles technologies et un certain manque d’agilité.

Les opportunités, elles, tiennent à la possibilité d’exploiter de larges bases de données clients, à la réflexion déjà ancienne sur les nouveaux produits et les nouveaux services et aux partenariats possibles avec des assurtechs. Quant aux menaces, elles viennent du risque de perte de la relation client et de l’émergence de nouveaux concurrents très puissants (GAFAM).

Dans ce cadre, les assureurs comblent leurs lacunes depuis plusieurs années. Avec le Robotic Process Automation (RPA), ils ont développé l’automatisation des tâches répétitives, simples et de masse, notamment sur les dossiers sinistres. Ces technologies d’intelligence artificielle permettent d’améliorer le service rendu aux assurés et de maîtriser les coûts (au moins les coûts de gestion). De même, l’utilisation de chatbot, assistant virtuel qui propose son aide à l’assuré, en indiquant les étapes à suivre pour conclure un contrat simple ou déclarer un sinistre se développe. Les gestionnaires disposent alors de plus de temps pour se consacrer aux tâches à valeur ajoutée et où à la compétence humaine est indispensable.

Une concurrence sur l’emploi

Avec l’utilisation de ces nouvelles technologies, les assureurs traditionnels peuvent parvenir à regarder en une seule et même pratique la relation client de bout en bout pour l’améliorer. Dès lors, ils peuvent répondre aux nouveaux modes de « consommation » de l’assurance souhaitée par les clients et développer des pratiques ou des services de prévention. Ils entrent donc en concurrence avec les assurtechs sur cette démarche de satisfaction du client. Ils tendent également à se développer sur des « marchés de niche » que les nouvelles technologies permettent de détecter.

Pour mener à bien cette « transformation digitale », les assureurs traditionnels ont besoin de nouveaux profils de collaborateurs centrés sur l’innovation et le développement informatique que sur les compétences techniques d’assurance. Là aussi, ces assureurs sont concurrents des assurtechs ou tout simplement les utilisent comme consultants ou apporteurs de projets dans le cadre de partenariats.

Les expériences assurantielles des GAFAM

Dans la description de l’environnement concurrentiel des assurtechs, il convient de ne surtout pas oublier les Gafam. L’arrivée de Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft dans l’industrie de l’assurance est perçue comme une sérieuse menace pour les assureurs français, du fait de leur maîtrise technologique, de leur orientation vers le service à la clientèle et de l’offre d’un parcours 100 % digitalisé aux clients. Selon Bain & Company, 52 % des Français ne seraient pas réfractaires à l’idée de s’assurer auprès des GAFAM, avec une proportion de 80 % pour la tranche d’âge 18/35 ans. Les « Millenials » sont souvent qualifiés de génération ATAWAD (Anytime, Anywhere, Any Device). Le marché des jeunes générations est donc a priori ouvert aux GAFAM.

Amazon est déjà présent dans l’assurance Santé aux États-Unis et dans l’assurance Voyage en Allemagne. Il propose aussi des assurances Automobile et Habitation dans d’autres pays. En octobre 2018, il a conclu un partenariat avec Aviva. Cela permet aux assurés d’Aviva de payer leurs cotisations via le « Wallet » (portefeuille) d’Amazon dénommé « Amazon Pay ». Cela permet un gain de temps au client, mais ouvre sans doute les fichiers clients d’Aviva à Amazon. Aviva souhaite utiliser dans l’avenir cette fonctionnalité dans l’assurance Santé. Amazon propose aussi l’assurance de certains produits électroniques avec « Amazon Protect » notamment pour les ordinateurs, tablettes, smartphones et l’électroménager, couverts contre les dommages, le vol ou les pannes au-delà de la garantie de 2 ans vendue par le fabricant. Cette offre est portée par Warranty Group, partenaire d’Amazon. La gestion de sinistre est assurée électroniquement par Amazon.

Les assurtechs, une chance pour Google and co

De son côté, Google a investi dans l’assurance santé avec Oscar Health aux États-Unis. Mais son expérience de proposer un comparateur d’assurances (Google Compare) s’est soldée par un échec en 2016, notamment au Royaume-Uni où la concurrence entre comparateurs s’est révélée trop agressive pour permettre à Google un revenu suffisant. Google a également monté avec Swiss Ré une filiale, Verily Life Science, qui vend des contrats de réassurance Santé aux entreprises aux États-Unis où beaucoup d’entreprises financent elles-mêmes la couverture santé de leurs salariés. L’entreprise Verily Life Science apporte ses compétences Big Data dans la connaissance des risques et Swiss Ré dans la gestion et la tarification des risques.

Pour les GAFAM, les assurtechs sont une chance. Les géants de la tech sont en position de force pour leur capacité de leadership, leur capacité financière d’acquisitions stratégiques, leur image mondiale, leur compétence marketing, leur base de clientèle et leur connaissance étendue des clients et de leurs besoins, et évidemment, leur domination technologique. Leurs faiblesses tiennent à leur méconnaissance de l’assurance et des diverses réglementations nationales, notamment dans le domaine de la santé, et les risques liés à la protection des données personnelles. Les opportunités résultent de la possibilité, via l’assurance, de conforter leur position de leader dans le marketing des biens de consommation et d’approfondir leur connaissance des besoins des clients. Quant aux menaces, elles sont essentiellement réglementaires et tiennent à la contestation de leurs positions monopolistiques et à l’utilisation des données personnelles.

L’avenir ? Se faire avaler…

Les GAFAM ne renoncent pas pour autant à investir dans les start-up de l’assurance. Google a investi dans Oscar Health qui propose de rémunérer les assurés, acquéreurs de bracelets connectés, qui sont rémunérés lorsqu’ils atteignent leurs objectifs liés à leur pratique physique. Il a également investi dans la start-up Lemonade en 2019, spécialisée dans les assurances habitation et les assurances Santé des animaux de compagnie ainsi que dans le comparateur d’assurances de particuliers Young Alfred et dans « Claimbot » qui est un robot en ligne destiné à gérer notamment les réclamations et les sinistres. Amazon développe un partenariat avec Acko,  start-up indienne, qui vend des contrats d’assurance Automobile et des contrats Santé individuels ou d’entreprise entièrement en ligne et payable par Amazon Pay. L’objectif est d’entrer rapidement sur le marché avec des prix très bas. Les GAFAM semblent donc choisir la voie du partenariat avec les assurtechs pour se développer sur le marché de l’assurance : elles leur apportent des bases de clientèle considérables permettant d’amortir le coût de l’innovation technologique.

Bilan des courses : les compagnies d’assurance traditionnelles ont d’ores et déjà investi dans les assurtechs. Pour l’heure, il s’agit d’échanges de bons procédés : aide à la mutation technologique d’un côté, transfert de compétence assurantielle de l’autre. Mais l’échange pourrait être rapidement inégal. Les compagnies progressent vite sur la voie de la transformation digitale en utilisant les idées et les procédés des start-up. Elles tendent aussi à réduire par leurs niveaux de salaires les spécialistes qui travaillent dans les assurtechs et peuvent proposer sécurité financière et perspectives de carrière à des innovateurs de talent. L’acquisition des start-up par les compagnies d’assurance, en passant du partenariat à l’intégration paraît à terme inéluctable, au moins pour les structures les plus performantes et les mieux adaptées à l’assurance. Il en va de même pour les relations avec les GAFAM. Il est probable que « les géants du Net » vont chercher à acquérir des assurtechs pour s’implanter sur le marché français, moins ouvert que les grands marchés anglo-saxons, mais cinquième marché mondial. Et deuxième sur le marché européen à 27 !

Quoiqu’il advienne, les start-up assurtechs sont éphémères sur le marché français. Très peu réussissent à obtenir l’agrément de l’ACPR. La majorité d’entre elles sont des intermédiaires d’assurance qui n’arriveront pas à faire face aux difficultés réglementaires et à la concurrence très rude sur notre marché. Et celles qui réussiront techniquement, se verront absorbées par les grands acteurs de l’assurance ou les géants du Web. Elles n’en auront pas moins permis et parfois conduit la révolution digitale du marché et assuré l’adaptation des grands acteurs à l’évolution rapide des modes de « consommation » de l’assurance par les nouvelles générations de digital natives.

À retrouver dans la revue
Revue Banque NºHS-STRAT-Enass-1-2022